Le journal Libération publie aujourd'hui, sous la signature d'Eliane Patriarca, un article sur l'hypocrisie de la position française vis à vis de la future directive européenne sur la protection des sols qui me semble illustrer une excellente stratégie de défense de l'action de l'Union Européenne.
On entend en effet bien souvent dire que l'Union Européenne manque de courage : mais est-ce manquer de courage, du point de vue de la Commission, que de refuser de se lancer dans une entreprise qu'on sait vouée à l'échec par l'opposition déterminée de quelques états-membres ? Normalement, le rôle d'une presse libre dans un pays libre est de savoir critiquer l'action de son propre pays lorsqu'elle s'écarte de l'intérêt commun. La Commission est fort bien armée pour savoir ce qu'on dit, ou plutôt, ce qu'on ne dit pas des affaires européennes dans la presse des états-membres : notamment sur les grandes et petites hypocrisies des administrations nationales.
On a pourtant pu lire dans les blogs de Libération quelques excellentes analyses sur le torpillage de la politique européenne de lutte contre les discriminations par l'actuel gouvernement français, projet porté, s'en souvient-on, par José-Manuel Barroso lui-même, candidat à sa propre succession et si souvent qualifié de lâche fossoyeur de l'Europe par ses détracteurs, notamment dans la presse française. Brillante contribution à la cause européenne que voilà, ma foi ! Nombre d'opposants déterminés à la construction européenne n'auraient sû mieux faire pour parvenir à leurs fins.
Mais, il faut bien l'admettre, défendre l'Union en révélant en quoi l'action des états-membres nuit à l'intérêt des européens (ce qui est particulièrement frappant, par exemple, dans la gestion de la PAC et de la Pêche) implique tout d'abord de mener des enquêtes et pas seulement des interviews. De dialoguer avec les personnes qui font l'Europe et pas simplement de répondre aux invitations de celles qui font profession d'en exposer le profil qui serve le mieux l'intérêt de leur maître du moment. C'est aride, c'est ingrat. Est-ce pour autant du journalisme ? Par définition, ça ne permet pas d'en obtenir la carte. Mais est-ce utile ? Certainement, répondra tout défenseur de la cause européenne.
Hum... Pauvre Europe et méchants états.
Abandonnons l'Europe, laissons ceux qui veulent protéger leurs sols (Espagne, Hongrie si j'en crois l'article) les protéger, laissons ceux qui ne veulent rien faire (Allemagne, UK, France) ne rien faire, et on en reparle dans 15 ans.
Quel est l'intérêt de vouloir faire à 27 ? Pourquoi ne pas laisser aussi jouer la concurrence entre états et réglementations. Est-il vital de légiférer dans tous les domaines pour 450 millions d'habitants ?
N'est-il pas plus efficace, dynamique, utile, de laisser les états les plus avancés faire ce qu'ils ont envie de faire sans forcer ceux qui peuvent avoir d'autres problèmes (parfois légitimes) s'occuper de leurs priorités.
Rédigé par : edgar | 19 septembre 2008 à 09:04
@ edgar :
"Pourquoi ne pas laisser aussi jouer la concurrence entre états et réglementations."
Que vient faire cette histoire de concurrence dans le sujet qui préoccupe Gus ici ???
Rédigé par : Jack le Castor | 21 septembre 2008 à 12:55
Le détail itonique que je tenais à souligner est qu'on peut difficilement à la fois jouer du quatuor de langue de bois pour défendre l'action si souvent hypocrite d'un état donné en europe et l'action de l'europe elle-même.
La question se pose à mon avis tout particulièrement pour la presse, qui justifie par sa supposée liberté de prendre parti le besoin de financements publics. Si j'observe avec un réel plaisir quelques auteurs parvenir désormais à défendre le travail de l'Union dans la presse française, y compris contre son pire ennemi qui est souvent l'action de la majorité du jour, je m'interroge sur ce dont cette attitude, exceptionnelle, témoigne face au discours sur les affaires européennes majoritairement tenu par la meilleure presse et l'élite de la blogogosphère francophone.
La concurrence entre états et règlementations existe déjà grâce à la mondialisation, notamment financière. L'Europe l'organise en interne plutôt que de laisser ce travail au marché. Vous devez vous souvenir des magnétoscopes de Poitiers, non ? JE sous-entends à juste titre dans votre propos toute la difficulté qu'éprouve la France à imposer son modèle social au reste du monde. De mon côté, je m'interroge sur la viabilité de la stratégie américano-européenne d'imposer un modèle de société (capitalisme financier et libre-échange) au reste du monde.
Rédigé par : Gus | 22 septembre 2008 à 12:28
Jack le castor, vous avez raison, mon commentaire ne répond pas à Gus, qui se soucie du poil dans la main de la presse (baobab ?).
Mais je saisissais l'occasion de signaler que ce processus de décision à 27 est imbécile (je propose une vraie fête européenne pour les 10 ans de discussion autour du thème doit-on baisser la TVA sur la restauration ?)
Rédigé par : edgar | 23 septembre 2008 à 11:11
Ha si seulement ce processus imbécile et surtout, son imbécilité était mis à profit pour ce qu'il est pour redéfinir le rôle des subventions publiques à l'industrie de la presse.
Ho, pardon, en fait, c'est fait :-) Reste juste à appliquer l'esprit des accords européens (à supposer que cela soit plus efficace que laisser crever)
Rédigé par : Gus | 23 septembre 2008 à 12:20