Une polémique nait à l'occasion des toutes dernières négociations menées par l'Union Européenne pour la signature rapide des accords intérimaires de commerce internationaux avec les pays dit "ACP" (Afrique-Caraïbes-Pacifique) : certaines associations prétendent avoir eu accès à une note interne de la Commission proposant aux administrations nationales concernées (dites "Comité 133") de se dispenser des versions de ces propositions d'accords traduites dans les (23 !) langues officielles de l'Union pour les examiner et de ce fait donner feu vert à la Commission pour entamer les phases finales de ces négociations.
Le document préciserait d'ailleurs que telle entorse au règlement aurait déjà été faite à l'occasion d'accord d'ailleurs lui aussi contesté sur le
transfert des données personnelles des passagers aériens, signé par l'UE et les
Etats-Unis l'an dernier dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Mais, indépendamment de ces questions de basse politique, pour quelle raison faut-il traduire ces documents ? C'est assez simple à comprendre : le travail de la Commission mène souvent, y compris dans ce cas précis comme dans celui du transfert des données personnelles sur les passagers à l'administration américaine, à l'adoption de lois engageant directement les citoyens et sociétés. Dans tous les pays de l'Union, le processus législatif et notamment le processus de formalisation de la loi est sujet à des protocoles destinés à en affirmer la force aux yeux du citoyen par la garantie implicite tant du bon exercice du contrôle démocratique que de l'accès du juge, donc, national, à des textes qui lui soient accessibles.
Si l'on peut à l'extrême limite imaginer que les processus d'affinement de la loi en construction qui sont la principale raison d'être en pratique des assemblées (et a-t-on envisagé de les supprimer ?) ne sont pas nécessaires à la pratique de la démocratie comme valeur fondamentale de nos sociétés, peut-on concevoir que les juges en charge des arbitrages ne puissent consulter jusqu'aux travaux préparatoires des lois européennes pour en percevoir l'esprit ?
Ou alors, doit-on imaginer qu'il faille avancer en direction d'une Europe dans laquelle, dans les faits du moins, l'exercice de la citoyenneté impliquera la pratique d'une ou plusieurs langues étrangères ? Je n'y serai pas à titre personnel opposé loin s'en faut : mais j'avoue encore douter pouvoir raisonnablement attendre cela de la majorité de mes concitoyens, ici et aujourd'hui, tout en insistant sur l'importance, au vu de l'ampleur de la tache, de qualifier explicitement de prioritaire telle ambition, par exemple, pour l'école primaire.
Mais l'éducation et notamment l'enseignement initial et de tronc commun, lequelinclut évidemment tous les enseignements nécessaires à l'exercice de la citoyenneté et notamment la maîtrise de la ou des langues n'est pas et ne sera certainement pas de sitôt une compétence de l'Union. Est-on face à un possible thèse de campagne aux européennes de 2009 ?
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