Rechercher



  • Recherche Google
    Web Publius

Statistiques


« Un modèle de société en miettes | Accueil | Les agro-carburants, cause de famine »

11 mars 2008

Commentaires

Julien

La raison en est simple : il existe parmi les grands établissements financiers européens (notamment les banques françaises : BNP Paribas, Société Générale, ...) plusieurs qui sont refinanceurs des intermédiaires américains actuellement en difficulté devant les appels de marge de leurs prêteurs. Les prêteurs __européens__ prêtent donc en dollar à des interlocuteurs __américains__. L'action étant concertée, il s'agit de circonscrire à tous les niveaux les risques de faillite généralisées.

Le marché monétaire, comme celui d'actions, est international. C'est notamment ce qui a fait son dynamisme. Néanmoins, ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain : le capitalisme financier a clairement été excessif et subit une crise bien méritée (opacité, titrisation, prise de risques, fiabilité des agences de notation). Mais le dynamisme financier a permis de soutenir la croissance du début de ce siècle.

Gus

Je vous remercie du fond du coeur de cette excellente explication.

Je souligne cependant que je ne vois pas le rapport entre cette initiative de la BCE dite "indépendante" et ses missions telles que définies par les traités.

Julien

Je ne doute pas que vous connaissiez la réponse vous-même, la question n'étant que rhétorique. Ce fut néanmoins l'occasion de lancer le débat...

Pour l'origine de cette initiative, je la trouve dans le "Traité instituant la communauté européenne", Titre VII, Chapitre 2, Article 105, paragraphe 5 :

"Le SEBC contribue à la bonne conduite des politiques menées par les autorités compétentes en ce qui concerne le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la stabilité du système financier"

Il me semble que l'action ressort d'une interprétation de cette phrase, même si on peut considérer que cette interprétation est large.

Néanmoins, ceci me pose d'autant moins de problème que l'intervention de la BCE, coordonnée avec les autres banques centrales, me semble tout à fait justifiée en l'état actuel. Si le débat a été posé à un moment de savoir si les banques centrales ne se contentaient pas de renflouer les fautifs qui auraient mérité une punition (aléa moral), je pense qu'ici on a dépassé ce stade : les dépréciations généralisées des actifs des banques dans leur bilan les poussent à chercher à récupérer des liquidités et donc potentiellement à entrainer une réaction en chaîne poussant à la faillite de nombreux acteurs financiers. Ces dépréciations ne concernent pas uniquement le domaine des subprimes : voir par exemple les obligations de Freddy Mac et Fannie Mae, considérées comme quasiment aussi sures que celles du Trésor Américain

Gus

Le SEBC, je crois, concerne bien plus de banques que la seule BCE.

Quid des autres ?

"Le SEBC est composé de la BCE et des banques centrales nationales (BCN) de tous les États membres de l’UE (article 107, paragraphe 1, du traité), qu’ils aient ou non adopté l’euro. "

Julien

On nage en plein débat juridique là, pour lequel je suis loin d'être expert...

Néanmoins, une relecture du traité instituant la communauté européenne donne, Titre VII, Chapitre 2, Article 107, paragraphe 3

"Le SEBC est dirigé par les organes de décision de la BCE, qui sont le conseil des gouverneurs et le directoire."

En bref, SEBC et BCE, c'est quasiment kif-kif. Les membres de la SEBC qui ne sont pas dans la BCE (et donc pas dans la zone euro) ont droit à un strapontin dans le conseil général, qui n'a qu'un rôle consultatif.

Voir http://www.banque-france.fr/fr/eurosys/europe/page2b.htm


Peut-on arriver maintenant, après quelques recherches de votre part et de la mienne, à la conclusion que la BCE (via le SEBC) a agit dans le cadre de ses prérogatives, ou du moins dans le cadre d'une interprétation éventuellement extensive de ces prérogatives, à la lumière de la phrase

"Le SEBC contribue à la bonne conduite des politiques menées par les autorités compétentes en ce qui concerne le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la stabilité du système financier"

?

Gus

La notion "d'action coordonnée" avec non seulement la FED, mais aussi la banque Suisse, employée pour désigner cette action précise, ainsi que l'absence dans cette "action coordonée" de nombreuses autres banques membres du SEBC m'incite à ne pas pouvoir considérer cette intiative comme un choix d'une BCE indépendante réalisant une interprétation extensive non seulement de ses missions, mais aussi de sa qualification, mais d'une sujétion de la politique de la BCE aux besoins de l'économie intérieure nord-américaine.

à moins bien entendu de considérer que le SEBC n'a rien à voir à l'affaire.

Julien

Si vous me permettez, ce que vous contestez, c'est :

+ la montée en puissance de la financiarisation de l'économie

+ le fait que cette financiarisation trouve son épicentre aux Etats-Unis

+ partant, le très fort déficit commercial et budgétaire américain

plutôt que l'action spécifique de la BCE ce jour.

En effet, si on part du pre-supposé que ces éléments sont un fait (qu'on peut contester, soit dit en passant) et à la lumière de la recherche que nous avons fait tous les deux, je ne vois pas en quoi l'action de la BCE serait contestable : elle en a le droit d'une part, et d'autre part c'est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement d'une finance mondialisée.

L'internationalisation des échanges fait que des défaillances aux États-Unis toucheraient inévitablement leurs correspondants en Europe. Et personne en Europe ne souhaite voir affaiblies encore BNP Paribas ou la SG, par exemple (sans parler de Northern Rock).

Gus

Je n'ai pas la prétention d'être économiste : je commente (critique) l'actualité d'une institution nommée Union Européenne, qui se construit, me dit-on, par les voies de Droit. Dans ce présent article, j'espérais, par un exemple choisi, illustrer le fait que l'Union ne peut, de facto, être entièrement considérée comme une construction juridique. Et incidemment, que prétendre que des aménagements juridiques (par exemple le traité de Lisbonne) sont nécessaires à la construction européenne est évidemment faux.

D'une manière plus générale, j'espère, toute hypocrisie mise à part, aider mes concitoyens à comprendre l'actualité de l'Union, même si cela consiste essentiellement à illustrer la thèse centrale de l'ensemble de mon propos : ceux qui, généralement, parlent d'Union Européenne tiennent depuis fort longtemps des discours tronqués, spécieux et réducteurs : mon propos inclus.

Et encore une fois, toute hypocrisie mise à part, j'espère contribuer à la compréhension par mes concitoyens du réel : du monde tel qu'il est. Et je vous remercie sincèrement de la limpidité et l'honnêteté de votre discours.

Je suppose que les jugements personnels que nous portons tous deux sur ces constats divergent. Tant mieux, si cela contribue à éclairer l'opinion de nos concitoyens.

edgar

Julien a raison sur un point : si des données non publiées indiquent qu'il faut de l'huile, la BCE est assez justifiée à en injecter un peu, même aux USA.

Gus a raison sur le fond : si la création de l'euro ne sert pas à imposer une nouvelle régulation des systèmes de change, elle ne sert à rien. Et si la BCE et l'UE mettaient le dixième de la hargne et de l'arrogance qu'elles emploient contre les nations à réclamer aux USA un peu de tenue dans leurs comptes, on pourrait peut être considérer autrement l'ensemble de l'affaire.

Au lieu de cela on a laissé les USA raconter longtemps que leurs déficits étaient extrêmement vertueux car ils supportaient la croissance mondiale...

dg

Débat trés intéressant et trés clair.
Le point qui me manque et peut être que Julien peut l'éclairer, c'est, quel est l'intérêt de la financiarisation de l'économie ? Quelques exemples concrets ?

Gus

Edgar : sur le fond de la chose (le "à quoi ça sert tout ça"), Krugman s'intéresse à l'effet produit par le plan : premières conclusions de ce qui s'annonce comme une longue série :

http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/03/12/mission-not-accomplished-not-yet-anyway/

Je n'ai pour l'instant trouvé aucun commentateur crédible qui affirme croire à l'efficacité d'un tel plan. Je ne crois d'ailleurs pas avoir été le seul à n'y avoir jamais cru depuis août 2007. Mais, effectivement, j'imagine mal la BCE accepter le reproche tout à fait prévisible qu'on lui aurait fait si elle n'avait pas bougé le petit doigt face à une déconfiture qui s'annonce comme de plus en plus probable : quel que soit le prix payé par les citoyens européens pour faire diversion encore quelque temps (le temps que les élections américaines aient effectivement lieu, peut-être...)

Julien

dg > Difficile de se prononcer sur la financiarisation à elle-seule. Cette dernière constitue un élément d'un phénomène plus global, celui de la mondialisation et la progression du libre échange.

Les effets positifs sur les 30 dernières années sont évidents : accroissement global de la richesse dans le monde, diminution de la pauvreté (les statistiques chinoises sont éloquentes, voir lien en bas du commentaire), diminution des prix des principaux biens de consommations pour les consommateurs occidentaux (il n'y a qu'à voir les conditions de vie en France il y a 30 ans et aujourd'hui).

Spécifiquement et plus dans le détail, la financiarisation a notamment participé à ce dynamisme en permettant la constitution de groupes internationaux (ceux-là même qui produisent les biens qu'achètent nos consommateurs), l'ouverture des frontières aux capitaux (possibilité pour les investisseurs d'apporter de l'argent frais dans les pays en voie de développement, flux dont le sens s'inverse actuellement, mais c'est un autre débat) ou encore un financement du développement plus facile à travers l'élargissement de la gamme de produits de prêts (incluant d'ailleurs les microcrédits).

Attention, je ne dis pas que tout cela se passe dans les meilleurs conditions possibles et dans le meilleur des mondes. Cela serait caricatural et contreproductif.

Pour synthétiser, financiarisation et mondialisation ont apporté diminution de la pauvreté dans le monde et amélioration de la qualité de vie. Mais il ne faut pas nier ses excès, dont par exemple la tendance à l'augmentation des inégalités.

Tout ceci n'empêche pas que, pour revenir au débat spécifique qui nous intéresse ici, il ne me semble pas souhaitable de promouvoir un effondrement du système actuel comme porte de sortie vers une éventuelle et hypothétique "amélioration". D'où l'intérêt du plan des banques centrales.

Pour finir, il apparaît clairement que les actions en cours ne suffiront pas, et que la sortie de crise n'est pas immédiate. Mais, en l'état, c'est "mieux que rien".

Lien
http://gribeco.free.fr/article.php3?id_article=49

Gus

En effet, Julien. Reste que, pour revenir sur un de mes thèmes fétiche, une confédération qui s'affranchit tant des règles du droit que de l'opinion publique, fût-elle ou non exprimée formellement ne me semble pas très différente de la défunte URSS, et subira probablement le même sort : plus rapidement peut-être, du fait de la plus grande fluidité des flux monétaires.

Julien

Je vous trouve bien pessimiste... Mais nous sommes là, comme vous le mentionniez dans votre commentaire plus haut, dans le cadre de jugements personnels de fonds divergents, ce qui n'enlève rien à la richesse du débat.

Gus

Ha ça.... comme le disent tant d'économistes en d'autres termes : "on est jamais à l'abri d'un coup de chance !"

dg

Julien,

J'ai eu le loisir de regarder quelques sites pour vérifier vos dires et j'en suis arrivée à
cette sommaire conclusion.
Au volume de pauvreté mondiale par rapport à la population en 1950, comparativement à celle des années 2000-2005, effectivement le niveau de pauvreté aurait tendance à toucher une moins grand pourcentage de la population mondiale , mais les analystes ne sont pas tous d'accord sur les chiffres pour mesurer ce que serait un dollars par jours à l'échelle comparative de référence d'accession aux denrées et services, soit 30 dollars aux EU dans les années 80. De plus la courbe des inégalités elle est plus qu'à la hausse, elle explose le rapport d'echelle, réduisant la proportion des richesses détenues par le plus grand nombre de personnes. Mais nous ne sommes pas , c'est vrai, dans une économie de redistribution, mais capitalistique.

Ce que m'évoque la financiarisation de l'économie est tout aussi sommaire, à l'image peut être de l'exécution de nombreuses entreprises dans le cadre de la récession économique des EU, et donc des populations concernées.(mais nous ne sommes pas au pic encore, à ce qu'il paraît) A l'image également de la descente aux enfers de l'Argentine, élève appliqué des investisseurs étrangers.


(Anecdote:Il n'est pas rare de se voir appeler en france, dans les petites entreprises, pour vendre son bien à des spécialistes de la finance. Fort heureux que des entrepreneurs considèrent que la richesse produite n'est pas une valeur exgérément gonflée, mais un travail réel réalisé par des hommes et femmes tout aussi réels.)

Ce que m'évoque également la financiarisation de l'économie c'est un peu aussi ce que l'on peut retrouver au travers de l'histoire des années 30 , avant la seconde guerre. Le fait de faire porter la charge des spéculations douteuses des grandes industries et banques aux contribuables.(Krach de la banque Oustric et banque ADam , France , 1930 ...avec implication du ministre des finances de l'époque et de la banque de france pour escompte de 125 000 000 de traites non commerciales) Achat de silence , commissions occultes , placement des élites au sein des conseil d'administrations, soutien de régimes facistes qui font de la restriction salariale
l'oreiller pour le grand capital. Cela n'est pas sans rappeler les commissions occultes actuelles des syndicats patronaux.
Finalement, qui se porte au secours du grand capital lorsqu'il s'effondre ?

Je voudrais bien croire les europhiles qui pensent que l'économie serait au service des populations. Je crois que l'histoire enseigne qu'elle est au service de quelques grands argentiers.
Et qu'à cela , malheureusement l'Europe n'apporte pas grand chose de nouveau.

dg

Sur la crise EU

http://www.newropeans-magazine.org/content/view/7758/87/

L'utilisation des commentaires est désactivée pour cette note.