Malgré la présentation d'une pétition de 500.000 signatures par la Confédération Européenne des Syndicats, la Commission Européenne réaffirme son refus de prendre l'initiative (qu'elle seule peut prendre) d'une directive-cadre sur les services publics.
La Commission se prononce en effet pour une approche sectorielle, dont l'évidente conséquence sera de réduire au plus petit dénominateur commun possible la notion même de service public. Sont particulièrement concernés par cette volonté de clarification du périmètre des services publics le secteur de l'éducation, les secteurs périphériques à l'éducation (cantines scolaires, "école après l'école") et de la santé (Publius regorge d'articles sur ces questions publiés entre 2005 et 2006). On peut par exemple imaginer que les états-membres devront, à moyen terme, savoir distinguer entre l'offre (libérale) de soins et le service (public) de santé, ou entre l'éducation obligatoire (service public) et l'enseignement professionnel (service potentiellement marchand).
Add: valery signale la très intéressante réaction de l'AFCCRE.
Une raison de plus pour s'opposer à cette Europe là et donc à ce traité là.
Rédigé par : mansuétude | 20 novembre 2007 à 16:27
@mansuétude : tu mélanges les choix de la Commission Barroso et le cadre dans lequel les décisions sont prises. Un traité qui renforce encore le rôle de nos élus est bon à prendre, justement pour équilibrer et contrôler la Commission et que celle-ci reflète encore plus les choix des citoyens lors des élections.
L'Afccre réagit aussi sur ce sujet : http://www.afccre.org/fr/article.asp?L=118864&K=IJT33994IJL30397II4081222IS1&id=3169
Rédigé par : valery | 20 novembre 2007 à 17:24
Sauf erreur de ma part, ni le TCE, ni Lisbonne n'ont jamais eu la moindre intention de retirer à la Commission Européenne l'exclusivité de toute initiative législative, et par là même, la capacité de ne donner aucune suite à quelque demande législative que ce soit, aussi puissament que la demande soit exprimée.
Je reconnais cependant que la création d'une Présidence stable au Conseil est de nature à porter atteinte à la crédibilité de la Commission : le Président de la Commission pourrait-il en effet s'opposer à l'opinion exprimée du Président du Conseil soutenu par une solide coalition d'états-membres ? Voire même, qu'est-ce qui interdirait au Conseil de servir de lieu de négociation à des accords entre états-membres en marge de l'Union ? Faut-il se réjouir de cela ?
Merci pour l'excellent lien, au passage. Il me semble que l'Afccre ne perçoit pas le fait que l'existence même du marché commun (et donc, de la concurrence libre en matière d'offre de services fussent-ils "publics" au sein de l'UE) s'oppose à leur vision.
Rédigé par : Gus | 20 novembre 2007 à 18:18
Il n'y a strictement aucune incompatibilité entre le marché commun et la garantie des services d'intérêt généraux. Le fait est que c'est avant tout un enjeu du débat politique y compris au niveau de l'Union européenne. la réponse n'est pas d'abandonner la construction européenne comme semble le vouloir ceux qui voudraient construire le socialisme dans un seul pays mais de porter à ce niveau un véritable débat politique et y imposer - lorsque c'est pertinent - des rapports de force entre la droite et la gauche.
Le fait est que tant que l'essentiel du pouvoir reste soupis à des impératifs intergouvernementaux, c'est à dire à des décisions prises au sein du Conseil avec une culture politique diplomatique privilégiant donc la recherche du consensus à tout prix - on se retrouve au niveau européen dans une situation de cohabitation ou plus exactement de grande coalition permanente. Allié au mode de scrutin proportionnel qui ne donne pas de majorité absolue à un camp plutôt qu'à un autre - et au principe des majorités qualifiée, la vie politique européenne est fondamentalement différente de ce qu'elle est au niveau national ou au moins au niveau fronco-français. Cela ne veut pas dire qu'elel existe pas, mais tout simplement que les décisions ne sont pas prises - comme en France - par un parti qui représente moins de 40% des voix mais par une conjonction de décideurs - issus de légitimités et d'origines politiques variées - qui doivent se retrouver nombreux à approuver une décision pour qu'elle puisse être mise en oeuvre.
Celà ne donne pas de lisibilité forte aux enjeux politiques européens mais ce n'est pas forcément moins démocratique puisque au final les décisions sont prises par des personnes qui représentent un nombre considérable de citoyens.
Alors bien sur les décisions sont moins souvent contestables que l'absence de décision.
La Commission est tout à fait en droit d'ignorer une pétition, même signée par 500 000 personnes (votre serviteur y compris) - chiffre relativement aisé à atteindre pour une organisation comme la Confédération européenne des syndicats qui représente tout le syndicalisme européen et cela signifie dans certains pays bien autre chose qu'en France. Parions toutefois que ses rapports avec la gauche du Parlement européen n'en seront pas améliorés.
Non seulement la Commission en a le droit en vertu des traités mais si il s'avère en effet qu'il n'y a pas de base juridique elle en a aussi le devoir. Dans cette hypothèse il convient alors que ceux qui souhaitent une directive de ce genre agissent en faveur de la création d'une telle base juridique. Là encore on regrette surtout d'avoir trop peu d'Europe et non pas pas assez.
Rédigé par : valery | 20 novembre 2007 à 20:52
valery, je pense que les lecteurs habituels de Publius apprécieraient que vous developpiez et détailliez ce que vous esquissez dans le premier paragraphe de votre dernier commentaire. Je crois en effet que l'erreur de l'AFCCRE est d'imaginer que dire "L’approche sectorielle, et l’approche horizontale, se focalisant sur certaines modalités de gestion des services, comme par exemple les concessions, n’est ni cohérente ni suffisante." suffit à lui seul, associé à quelques maigres références juridiques (donc, des cas d'espèce) à remettre en question le fondement de l'union, à savoir, le marché commun dans lequel la concurrence libre et non-faussée est la règle.
Rédigé par : Gus | 20 novembre 2007 à 23:49
Les deux approches sont en effet envisageables et peuvent se défendre. Toutefois dans un contexte où une partie des citoyens - ceux qui sont persuadés que les services d'intérêt général ne nécessitent pas de réformes, pas toujours à tord d'ailleurs - sont préoccupés par cette question, une loi-cadre européenne consacrée à la question contribuerait à donner une plus grande lisibilité à la politique suivie que une approche sectorielle.
En toute hypothèse si le fondement juridique qu'entend utiliser la Commission est le traité de Lisbonne il faut attendre l'entrée en vigueur de celui-ci pour que des décisions soient prises - et donc la prochaine Commission européenne. Cette situation fait que ce thème peut être un enjeu des élections de 2009 car il me semblerait utile du point de vue de la qualité du débat que les élections européennes se jouent sur des enjeux effectivement européens.
Rédigé par : valery | 21 novembre 2007 à 07:22
Je me permets une remarque de fond : l'organisation même de la Commission est sectorielle (avec ses DGs), comme l'a voulu Delors. La Commission ne sait pas travailler autrement que sectoriellement. Or, la Commission a, de par les traités, des obligations de résultats, traditionnellement réattribuées à telle DG. Bien plus qu'on gouvernement, c'est une administration : et la création du poste de Pdt du Conseil devrait aggraver la tendance.
Rédigé par : Gus | 21 novembre 2007 à 08:17
Je ne comprends pas : la Commission a-t-elle besoin du traité de Lisbonne pour enterrer dix ans de débats sur la directive cadre services public qu'elle ne pouvait pas jusqu'alors enterrer avec Nice ? Quel rapport entre Lisbonne et cette directive qui n'existera jamais ?
Rédigé par : - | 21 novembre 2007 à 08:59
0,1% des européens ont signé cette pétition...
Déjà pour Barroso 500 millions d'européen n'ont pas à proposer, alors un telle pétition ne risque pas de le défriser.
Rédigé par : Etudiant X en Droit | 21 novembre 2007 à 17:47