Comme cela est le cas depuis la création de ce blog collectif, chaque auteur n'engage que lui même par ses propos. Il va donc sans dire, mais il va mieux en le disant, que les propos de Gus dans son billet du jour n'expriment pas l'opinion des autres rédacteurs, à commencer par moi-même, bien au contraire.
Je n'adhère nullement à l'argumentation de « ce qui a été refusé par référendum ne peut être accepté que par referendum ». Cela n'a absolument aucun fondement juridique, constitutionnel, logique ou rationnel. La France est une démocratie représentative, le référendum n'est qu'un moyen exceptionnel pour le peuple d'agir à la place du législateur. Cette expression étant nécessairement réduite par rapport à celle du parlement (dans un référendum, on dit oui ou non, il n'y a pas de droit d'amendement ne de travaux en commission), le principe est que c'est le parlement qui légifère. La constitution ne prévoit aucune hiérarchie entre les deux, elle met ces modes de décision sur un strict pied d'égalité. C'est nier cela qui est un déni de démocratie. Parler de trahison quand on respecte la constitution n'est pas sérieux. Le président actuel et sa challenger prônaient tous deux la relance de la construction européenne sur la base du TCE. Quatre scrutins ont confirmé coup sur coup la débâcle des partis du non et approuvé des partis opposés mais prônant tous deux une relance de la construction européenne sur la base du TCE. Un référendum en 2005 viderait de leur sens quatre scrutins en 2007 ? Voilà un déni de démocratie, un vrai.
Autre argument entendu, non soulevé par Gus : le Traité de Lisbonne reprenant beaucoup de stipulations du TCE (PDF) qui a été refusé, seul un référendum pourrait l'accepter. L'argument se pare d'un masque juridique, celui du parallélisme des formes. Outre ce qui vient d'être dit, deux contre-arguments battent en brèche cette affirmation.
D'une part, il y a une nette différence. Le TCE proposait la fusion des trois communautés et 4 traités en un texte unique, baptisé constitution européenne. L'Union européenne acquérait la personnalité juridique au plan international, avait un hymne, un drapeau, et des institutions et règles uniques. Le traité modificatif (TM) ne fait qu'amender les traités existant, en en fusionnant deux. Il n'y a plus rupture, mais continuité. Dès lors, l'aspect symbolique voulu par le référendum (avec le résultat que l'on sait) ne se justifie plus.
D'autre part, pour qu'un tel référendum puisse avoir lieu, il faudrait que les Français lisent et comprennent les Traité de Paris instituant la CECA, Traité de Rome instituant la CE, Traité de Rome instituant l'Euratom, Traité de Maastricht sur l'Union européenne, modifiés par les traités d'Amsterdam et de Nice, le traité modificatif, étudient les textes consolidés des traités amendés dont le nouveau traité sur fonctionnement de l'UE (TFUE) issu de la fusion du Traité de Rome et de Maastricht. Une relecture du TCE sera éclairante pour comparer les modifications. Plus naturellement les annexes et déclarations et réserves lors de la signature du TM. Grosso modo, un bon millier de pages de langage juridique technique. Qui peut affirmer sérieusement que ce débat est possible, souhaitable, et indispensable à la démocratie ? Que la campagne sera, contrairement à celle de 2005, une campagne relevée, où on débattra avec passion des conséquences du maintien du compromis de Ioannina sur la pondération des voix au Conseil européen, alors que sans prendre mes concitoyens pour des ignares, je pense que la plupart d'entre eux ignoraient jusqu'à cette seconde l'existence de ce compromis et ignorent toujours ce qu'il dit ?
Un référendum ne peut être organisé que sur une question simple, ou on peut répondre par oui ou par non, et qui est un choix dont les deux termes sont également valables. Comme sur la réduction ou non du mandat présidentiel à 5 ans.
Mais le référendum de 2005 était une erreur. Parce qu'il n'y avait pas de meilleure voie que d'accepter le TCE, sauf à abandonner le projet européen. Le "plan B" promis par les nonistes ayant fait pschitt, la supercherie est désormais connue : il n'y en avait pas, et les candidats du non ont payé leurs mensonges aux dernières élections présidentielles. Ne comptez pas sur moi pour pleurer sur leur sort.
A ceux qui demandent qu'on refasse la même erreur car comme on l'a déjà commise une fois, on ne pourrait plus jamais faire autrement, un simple mot qu'ils affectionnent : non. Il y a eu assez de dégâts comme ça.
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