Noirs bien entendu! Donc, trois jours après la France, voilà que les Pays-Bas (appelés aussi Hollande, une certaine personnalité politique française aurait du se méfier de cette homonymie) rejettent à leur tour ce traité constitutionnel, de manière encore plus massive et avec un taux de participation significatif. Certes, avec des motifs sans doute différents et parfois contradictoire avec le Non français, mes amis ouistes ne manqueront pas de me le faire remarquer. Mais les faits sont tétus. Après nous être entendu répéter, semaines après semaines, que nous serions les seuls moutons noirs d'une Europe unie derrière ce texte, nous voici donc deux. Un début de troupeau en quelque sorte.
Bien évidemment, respectueux de la souveraineté de chacun des peuples de l'Union (des peuples, pas des Etats, ce que l'on semble souvent confondre ici ou là; seul le peuple est souverain, agrégation de souverainetés individuelles de citoyens), je considère que le processus de ratification doit se continuer jusqu'à son terme, c'est à dire que tous les peuples doivent se prononcer. Histoire de voir si par hasard le troupeau ne s'agrandirait pas encore un peu. Et je suis pour le coup totalement en accord avec les principaux dirigeants européens sur ce point. Je laisse un instant la parole à Jean-Claude Juncker à ce sujet: "Je reste néanmoins d'avis que le processus doit pouvoir continuer dans les autres pays. Nous voudrions que les autres pays aient la possibilité de se livrer avec la même intensité au même débat" (conférence de presse commune entre M. Juncker, Barroso et Borrell. Je remarque au passage que M. Juncker prend acte de l'intensité du débat en France et aux Pays-Bas. Je n'ai pas souvenir qu'un tel constat ait été fait pour les précédents pays ayant ratifié le traité (mais cela m'a sûrement échappé).
Car enfin, si tout s'arrêtait maintenant, outre que ce serait faire injure à la fois aux pays ayant déjà ratifié le texte comme aux pays ne l'ayant pas encore fait, outre que la situation est explicitement prévue dans le processus de ratification (la règle des 4/5), ce serait un démenti formel de ce que l'on nous a également seriné durant la campagne, à savoir la perte d'influence de la France sur la scène européenne. Ainsi donc, ce coq gaulois dont on a moqué l'importance qu'il se donnait, animal ridicule pataugeant dans son nationalisme étriqué et égoïste, aurait, avec un petit coup de pouce de son ami batave (mais dès lundi, nombre de commentateurs ne donnait pas bien cher du traité après le seul non de la France), réussi à stopper la marche en avant de la constrution européenne. Il serait devenu indispensable à ces 23 autres compagnons de route. Non, je n'ose y croire. Je dois encore me tromper.
Alors demain? Redonnons la parole M. Juncker: "la Présidence a décidé que le Conseil européen des 16 et 17 juin prochains pourrait utilement se livrer à une analyse collective et approfondie de la situation." Ce serait effectivement une première étape utile. Mais encore : "Nous sommes confiants que nous saurons collectivement - gouvernements nationaux, institutions européennes, partis politiques, partenaires sociaux, société civile - et en partenariat trouver les moyens de faire progresser le projet européen autour d'un large consensus en ce qui concerne son identité, ses objectifs et ses moyens." Relisez bien cette phrase. Il ne manque personne? C'est étonnant la capacité de nos dirigeants européens à oublier un acteur majeur: le citoyen. Mais en disant cela, je ne doute pas que certains n'hésiteront guère à me traiter de populiste (je me fais déjà traiter de fasciste dans certains commentaires, plus rien ne m'étonne). Car, enfin, pour avoir participé à quelques réunions publiques dans le fin fond de ma campagne, outre le fait que cela faisait bien longtemps que je n'avais vu autant de personnes assister à des réunions politiques publiques, j'ai été frappé par le fait que la plupart des militants et intervenants étaient de "simples" citoyens et que le débat a totalement échappé aux partis politiques traditionnels. En ce sens, oui, les semaines, les mois de débat auquel nous avons assisté marquent le grand retour de la mobilisation citoyenne. Et c'est à mon sens la première victoire du référendum, quel qu'en fut le résultat final. Et demain, il se pourrait bien que des initiatives émergent de cette mobilisation citoyenne, puisque les acteurs traditionnels, nos partis politiques, semblent totalement congelés et incapables de sortir de leurs querelles internes.
Alors, un mouton, deux moutons, trois moutons, quatre moutons... dormez bien leaders politiques de tous poils et faites de beaux cauchemars, le citoyen lui est en train de se réveiller et peut-être, de reprendre son destin politique en main.
"Et demain, il se pourrait bien que des initiatives émergent de cette mobilisation citoyenne, puisque les acteurs traditionnels, nos partis politiques, semblent totalement congelés et incapables de sortir de leurs querelles internes."
Et si vous précisiez, vous même, tout de suite, en tant que citoyen, vos propositions ?
Rédigé par : marc | 02 juin 2005 à 12:16
Attention Krysztoff, les Pays-Bas ne sont pas la Hollande. Les Hollandes (septentrionale et méridionale) ne sont que deux des douze provinces des Pays-Bas. ;-)
Rédigé par : Yannick | 02 juin 2005 à 12:18
Moutons noirs d'un côté, noirs tons mous de l'autre. Je partage tes espoirs et l'essentiel de ton appréciation, Krizstoff.
Mais ça :
"dormez bien leaders politiques de tous poils et faites de beaux cauchemars, le citoyen lui est en train de se réveiller et peut-être, de reprendre son destin politique en main."
...ça va faire lever les bras aux ciel de certains, sans parler des invectives du genre "déni de la démocratie -regarde les choses en face, ici c'est représentatif pas participatif-" ou "populiste démagogue" ou encore, plus soft, plus empathique : "tu te fais avoir par des voix habiles mais qui se servent de tes bonnes intentions pour de sombres desseins qui t'échappent..." enfin, j'imagine.. l'as-tu imaginé aussi ou bien ?
Amicalement, je me permet d'écrire. Ca me fait du bien de lire autre chose que du catastrophisme misérabiliste ou de la mise en garde qui se veut prophétique. Merci mec.
Rédigé par : quibou | 02 juin 2005 à 12:19
@ Krysztoff
La participation populaire que tu appelles de tes voeux n'est-elle pas comprise dans la « société civile » de M. Juncker ?
Rédigé par : Yannick | 02 juin 2005 à 12:23
Le deuxième mouton est brun hélas, et j'ai du mal à comprendre qu'un tenant du oui comme du non puisse se réjouir d'une telle élection. Détacher le contexte dans ce cas là est franchement significatif d'un manque de recul quasi malsain ...
Pour le reste, si en effet, une vague durable de mobilisation citoyenne peut ressortir du non, ça sera toujours ça de pris, et de bien pris ... Mais reparlons-en dans quelque temps ...
Rédigé par : Ergonaute | 02 juin 2005 à 12:24
ouessant va etre trop petite pour acceuillir ces moutons noir
Rédigé par : tonton fernand | 02 juin 2005 à 12:29
un mouton, deux moutons, trois moutons, 4, 5, 6 ......17, 18.....
Je crois que le débat devient soporifique mais pas inutile parce qu'il va faut s'entraîner à la dure épreuve du farniente
Rédigé par : Fulcanelli | 02 juin 2005 à 12:36
En fait de moutons, je vois plutôt des lemmings. Gare au grand bond en avant lorsque l'on est au bord du gouffre...
Rédigé par : Hugues | 02 juin 2005 à 12:37
Tu pourrais m'expliquer la différence entre la société civile et les citoyens ?
Quelques indices : societas en latin désigne l'association volontaire, la communauté. Civile vient du latin civicus, relatif à l'état de citoyen. Quand on parle de la communauté des citoyens, on ne parle pas des citoyens ?
Va-t-il falloir analyser aussi les propos des conférences de presse pour nonnien malcomprenant ? ;-)
Rédigé par : Eolas | 02 juin 2005 à 12:45
@ krysztoff
eh oui il y a deux moutons…pas noirs mais bruns…
1 mouton, 2 moutons, 3 moutons…dormez bien citoyens, l’avenir n’est pas rose, il est brun…
Rédigé par : margit | 02 juin 2005 à 12:48
Et si vous précisiez, vous même, tout de suite, en tant que citoyen, vos propositions ?
Le plan F par exemple
Quelques indices : societas en latin désigne l'association volontaire, la communauté. Civile vient du latin civicus, relatif à l'état de citoyen. Quand on parle de la communauté des citoyens, on ne parle pas des citoyens ?
Eolas, on n'est plus au Moyen Age, citoyens est pris dans le sens d'un individu non pas associé mais doté d'une volonté de déterminer la gouvernance (ça date de 1789)
Société civile est une notion de sociologie très contemporaine, qui désigne les gouvernés par rapport à ceux qui gouvernent.
Rédigé par : Fulcanelli | 02 juin 2005 à 12:51
Le coq gaulois a prouvé sa capacité de nuisance. Ce qui est contesté, c'est sa capacité à imposer son modèle à toute l'Europe entière. Nuance.
Juncker n'a oublié personne, sauf les soviets d'ouvriers,paysans et soldats, s'il en est. Encore qu'ils pourraient bien faire partie de la société civile (tant qu'ils ne sont pas armés...). ceci mis à part, on ne voit pas bien comment faire participer le citoyen lambda, en dehors de tout corps constitué.
Non, je ne vous traiterait pas de populiste, c'est un gros mot. De spontanéïste, ou d'anarchiste peut-être, je ne sait comment qualifier votre foi dans les initiatives émergentes..
Ceci dit, bonne chance à Juncker. Il n'est pas évident que ses vues s'imposent à ceux qui veulent tout enterrer.
Rédigé par : indigne | 02 juin 2005 à 12:53
Fucanelli : et les gouvernés, en démocratie, c'est pas les citoyens ? Ca date de 1789 aussi.
Rédigé par : Eolas | 02 juin 2005 à 12:55
===> Mobilisation citoyenne ?
Quand je vois ce genre de sondage à J+2, j'ai l'impression que le "n'importe quoi" a encore de beaux jours devant lui, et que la mobilisation va retomber comme un soufflé au fromage, pour retomber dans les plaignonites habituelles.
http://www.csa-fr.com/dataset/data2005/opi20050601a.htm
Quasi 60% sont contents du duo Villepin/Sarko, qui va pouvoir principalement "améliorer la compétitivité des entreprises françaises", mais pas vraiment "lutter contre le chômage" ou "réduire les inégalités" !
No comprendo...
===> un démenti formel de ce que l'on nous a également seriné durant la campagne, à savoir la perte d'influence de la France sur la scène européenne
Ce démenti formel, ce serait que la France est effectivement tout à fait capable de scotcher l'Europe dans le traité de Nice pour des années ? Ok, si c'était ça le but...
Pour l'orientation de l'Europe vers une construction plus politique/sociale, la preuve de l'efficacité du "Non" est encore à faire.
Je trouve ce billet bien aigre ou acide, pour quelqu'un qui devrait se réjouir d'avoir gagné, et commencer à développer les idées positives issues du Non.
Rédigé par : Bladsurb | 02 juin 2005 à 13:09
""Fucanelli : et les gouvernés, en démocratie, c'est pas les citoyens ? Ca date de 1789 aussi.""
Disons qu'il y a eu une sorte de flou avec Rousseau, enfin, c'est ce que je pense.
La démocratie représentative distingue bien gouvernants et gouvernés parce que la volonté générale est un colosse aux pieds d'argile
Rédigé par : Fulcanelli | 02 juin 2005 à 13:34
"dormez bien leaders politiques de tous poils et faites de beaux cauchemars, le citoyen lui est en train de se réveiller et peut-être, de reprendre son destin politique en main."
Vraiment ? Vu le nombre de contre-vérités qui ont été largement diffusées pendant la campagne, autant, si ce n'est plus, du coté du non que du oui, cette affirmation me laisse dubitatif.
La campagne du 'non' s'est appuyée en grande partie sur la thèse "on vous ment" (les medias, le pouvoir, etc...). Rien de mieux comme argument pour convaincre que vous dites la vérité.
Rédigé par : Guillaume | 02 juin 2005 à 13:47
Pour vous réveiller un peu, un jeu. Quelle est la couleur politique de celui qui a écrit ceci ?
Notre pays vit des pages étonnantes. En effet, pour la 1ère fois de notre Histoire, notre Ministre de l'Intérieur, celui qui est garant de l'impartialité de l'Etat, qui dirige les préfets, la police, la gendarmerie,qui a la tutelle sur les collectivités locales, qui est en charge des élections est aussi le président du premier parti politique en France et conservera la présidence du Conseil Général des Hauts de Seine. Je suis peut-être trop attachée à l'éthique républicaine, mais cette situation m'interpelle sérieusement. Dans ce prolongement, je m'interroge également sur les propos de Nicolas SARKOZY qui explique que pour répondre aux coups bas dont il serait victime "la meilleure situation c'est d'être à l'Intérieur" et de lancer "Je vais redevenir le patron de ceux qui font actuellement des enquêtes sur moi.Il y en a qui doivent mal dormir depuis qu'ils savent que je reviens."
Par ailleurs, quand on m'expliquait que nous avions désormais deux premiers Ministres, je ne voulais pas le croire...Cela y ressemble un peu... Force est de constater que c'est du jamais vu que deux ministres soient annoncés en même temps. Normalement, le Président de la République nomme le Premier Ministre, ensuite nous avons la composition de l'ensemble du gouvernement. Hier, Dominique de VILLEPIN était l'invité du JT de TF1, ce soir nous avons Nicolas SARKOZY. Quand l'un communiquera, l'autre communiquera également.
En terme de lisibilité, on nous annonce que l'emploi est la priorité des priorités (ce n'était pas le cas auparavant???), pourquoi le numéro 2 n'est il pas le ministre à l'Emploi plutôt que le Ministre de l'Intérieur? et en numéro 3 le Ministre de la Défense. et non pas le Ministre à l'Emploi?
Rédigé par : Fulcanelli | 02 juin 2005 à 14:09
C'est vrai, ça, c'est à vous dégouter de voter non.
Rédigé par : Eolas | 02 juin 2005 à 14:15
"Relisez bien cette phrase. Il ne manque personne? C'est étonnant la capacité de nos dirigeants européens à oublier un acteur majeur: le citoyen"
On peut trouver bien pire:
"Europe minister Douglas Alexander acknowledged that the French and Dutch results had left the constitutional treaty in "serious difficulty", but insisted that "this treaty was agreed by 25 nations ... it is not for one country to declare it dead"."
Guardian
Réveil M Alexander, c'est pas 25, c'est 23 au plus.
Sur les moutons bruns, les Margit et autres, vous allez continuer longtemps a dire que le non est xenophobe et fasciste ?
Vous feriez mieux de vous demander ce qu'a voté la communauté polonnaise en France. Vous savez ces gens qui sont venus travailler dans nos usines et mines et sont aujourd'hui au chomage ( ou préretraite ).
Rédigé par : Eric Lauriac | 02 juin 2005 à 14:16
C'est un UMP, c'est certain. Raffarin sous un pseudo. :P
Rédigé par : Philippe | 02 juin 2005 à 14:16
Quel optimisme ! on dirait du Candide...
Je ne vois pas non plus le motif de se réjouir parce que la France peut, à elle seule, stopper la construction européenne.
Surtout lorsqu'elle place Sarko à sa tête pour un moment. Surtout lorsque le rapport des forces penche en faveur de la droite européenne : rendez-vous compte, 20 pays syur 25 bientôt !
C'est avec eux qu'on va faire du social ? Ben dis donc, bon courage.
Alors, bien sûr, on peut se prendre à rêver benoîtement : "le citoyen lui est en train de se réveiller et peut-être, de reprendre son destin politique en main"...
Ben dis donc : tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes...
Rédigé par : Praxis | 02 juin 2005 à 14:16
Il compte p-ê les observateurs avec comme De Villiers. :P Ils sont forts ces turcs. :P
Rédigé par : Philippe | 02 juin 2005 à 14:19
@ Fulca :
On se réveille ?... il me semble que les conséquences du non on été évoquées huit à dix mille fois sur ces pages, non ?
Mais c'est pas grave tu sais, le libéralisme, le vrai, ça peut marcher en France.
Ah bon ? tu as voté justement contre ce libéralisme ? Je sais pas quoi te dire... de revenir dans 20 ans, quand ça ira mieux et que l'alternance sera possible ?
Rédigé par : Praxis | 02 juin 2005 à 14:21
Ca y est.
C'est la faute au non si on a sarko et villepin !
Elle est bonne celle la !
Et si le oui passait, on aurait eu qui ? Ah oui villepin et sarko !
Faut pas tout le temps essayer de nous attribuer tous les maux du monde. On dirait la theorie du complot inversé !
Rédigé par : RilaX | 02 juin 2005 à 14:26
RilaX : avec le oui, la gauche est explosée, atomisée, rendue inexistante. La conséquence était prévisible.
En 2007, une alternance était possible.
Là, c'est enterré, comme le TCE !
Rédigé par : Praxis | 02 juin 2005 à 14:27