Il n'est jamais facile d'exposer ses raisons en avant-dernier. Parce que l'on sait que l'on n'aura pas, par la force des choses, le dernier mot. Parce qu'on risque aussi de répéter, en moins bien, des arguments qui ont déjà été exposés. C'est pourquoi ai-je décidé de prendre une route un peu différente avant d'arriver aux raisons qui me feront, demain, voter "oui" à la constitution européenne. En commençant un texte qui sera forcément très long par un nécessaire retour en arrière.
Il y a presque un an, donc, le 18 juin 2004, les chefs d'Etat et de gouvernements européens réunis à Bruxelles avaient enfin fini par se mettre d'accord sur le texte du Traité établissant une Constitution européenne. L'accord était intervenu, comme c'est l'habitude dans les CIG, au bout d'une séance de marchandages plus ou moins mesquins. Ainsi, le nombre maximal de députés au Parlement européen, fixé à 736 dans le texte présenté par la Convention, avait été porté à 750. De quoi énerver un commentateur, qui voyait dans cette modification un symbole de la dégradation profonde du texte par les chefs d'Etats et de gouvernement :
[C]e genre de correction de dernière minute, dans le mauvais sens (le Parlement européen est déjà pléthorique), est symptomatique de l'ensemble de l'accord sur la Constitution européenne trouvé vendredi à Bruxelles.
Les seuils de vote au Conseil des ministres révisés notablement à la hausse, le maintien de 25 commissaires jusqu'en 2014, le cadre financier pluriannuel qui reste voté à l'unanimité : tout cela risque de mettre en péril les fragiles promesses de plus grande efficacité que contenait le texte adopté par la Convention.
Après avoir aussi noté le fait qu'une citation de Thucydide qui devait ouvrir le texte du traité était pareillement passé à la trappe, notre commentateur étalait encore davantage sa déception :
Juridiquement, cette suppression est absolument sans importance. Symboliquement, par contre, elles confine au tragique. Cette citation ("notre Constitution... est appelée démocratie parce que le pouvoir est entre les mains non d'une minorité, mais du plus grand nombre"), inscrite en caractères grecs dans la Constitution, était pour moi l'une des rares manifestations de la solennité et de la grandeur du texte : une référence à un idéal commun et à la tradition humaniste, en même temps qu'un appel à ce que le système politique de l'Union s'inspire davantage des vertus de la démocratie athénienne.
Il prenait certes soin, à pas uniquement pour la forme, de relever quelques avancées :
Tout n'est certes pas mauvais dans le texte adopté vendredi : le poste unique de ministre des affaires étrangères, la fin d'un système de présidence tournante qui devenait ingérable ou encore l'extension des pouvoirs budgétaires du parlement sont autant d'avancées appréciables. La principale qualité du texte est en fait de raboter certains des défauts les plus fâcheux du traité de Nice, ce qui est tout à la fois beaucoup, et pas grand chose.
Mais il relevait immédiatement après une tare congénitale du texte, en employant une métaphore marmoréenne qui allait, par la suite, faire florès :
[L]e projet de Constitution sur lequel les chefs d'Etat se sont mis d'accord à Bruxelles reste affecté d'un vice fondamental : celui d'être, juridiquement, largement assimilable à un simple traité. A ce titre, le texte devra non seulement être ratifié par les 25 actuels Etats membres pour rentrer en vigueur, mais cette procédure périlleuse devra être renouvelée pour toute tentative ultérieure de révision. A la différence, par exemple, de la Constitution des Etats-Unis, qui peut être modifiée avec l'assentiment des 3/4 des états fédérés. Autant dire que les défaut et les limitations du texte européen seront quasiment gravés dans le marbre.
Et de conclure, sévère :
Dans ces conditions, pour paraphraser Stendhal, la seule excuse de cette "Constitution" est qu'elle a peu de chances d'être un jour mise en oeuvre, tant l'obstacle référendaire paraît aujourd'hui insurmontable.
Le titre de l'article était "Nice bis". Et le commentateur, évidemment, c'était moi.
Autant dire que mon enthousiasme pour le traité constitutionnel n'était pas, l'année dernière, à proprement parler délirant. Il ne l'est toujours pas aujourd'hui. Non seulement à cause de tous les petits arrangements entre ennemis de la CIG. Mais aussi parce que, plus fondamentalement, il n'y a rien qui soit, dans ce texte, de nature à transporter le lecteur, à lui donner l'impression qu'il s'agit-là de la loi fondamentale qu'une communauté politique se donne à elle-même.
A cause d'une bonne partie de la partie III. A cause des articles pleins de bons sentiments et de politiquement correct à peu de frais que sont ceux sur les valeurs et les objectifs de l'Union. A cause de plusieurs passages - je pense aux engagements des Etats concernant l'augmentation des dépenses militaires ou la libéralisation des services- qui n'ont rien à faire dans un texte constitutionnel, pour la bonne raison qu'ils n'ont pas un iota de force juridique. A cause, aussi, de la quasi-totalité des annexes et des protocoles, qui, des parts nationales dans le capital de la BEI aux résidences secondaires danoises en passant par le détail des abats qui entrent dans la PAC, constituent l'un des tue l'amour les plus efficaces que la main du juriste ait jamais rédigé.
Une bonne part de la déception vient évidemment du fait que la Convention ait choisi de désigner ce texte "constitution", et qu'elle ait décidé d'y inclure la fameuse partie III. Il est toujours facile de fustiger le caractère funeste de ce choix stratégique (je ne m'en suis pas privé), mais force est de connaître que ces décisions n'étaient pas a priori absurdes : pour l'emploi du mot "constitution", il s'agissait d'officialiser le fait que l'Union européenne était devenue beaucoup plus qu'une simple organisation internationale chargée de mettre en place une zone de libre-échange en Europe. Et de rendre en quelque sorte irréversible le principe de l'Europe politique, en espérant que le symbole contribuerait à créer un demos européen. Quant à l'inclusion de la partie III, elle avait était demandée par la gauche européenne, pour que ce soit la Convention, et non les chefs d'Etats, qui puissent y apporter des modifications.
Mais la déception provient aussi d'une autre cause, qui n'a pas été à mon sens assez soulignée : le mandat de la Convention ne lui permettait pas un instant de rédiger un texte qui réorientât de façon radicale l'architecture institutionnelle de l'Europe. La constitution proposée par Robert Badinter (pdf), et même celle rédigée par The Economist (pdf), correspondent beaucoup plus, qu'on qu'en pense par ailleurs de leur qualité, à l'image que nous nous faisons, nous Français, d'une constitution : courtes, recourant le moins possible à l'eurojargon et quasiment exclusivement consacrées à la description des mécanismes institutionnels. Mais l'épée de Damoclès qui était suspendue au-dessus des crânes parfois chenus des conventionnels était le rejet pur et simple de leur texte par les chefs d'Etat au cours de la CIG.
C'est la raison pour laquelle je trouve la critique sur la médiocrité des représentants à la Convention assez injuste : les conventionnels sont déjà allés très loin dans l'interprétation de leur mandat. Le fait que leur texte ait pu franchir, sans trop de dommages, le redoutable obstacle de la CIG est déjà, en soi, un petit miracle, qui doit beaucoup à une alternance inespérée et inattendue en Espagne.
Miracle ou pas, le constat initial demeure : cette constitution ne répond pas, pas encore, à la haute idée que je me fais d'une constitution européenne. Et pourtant, je voterai néanmoins "oui" demain. Dans un autre monde, cela ferait de moi, je suppose, un héros de la cause ouiste, en tant que transfuge, sinon du camp du "non", au moins de celui des "fortement indécis". Mais le monde est ainsi fait que mon revirement m'expose à la vindicte d'une bonne partie du peuple de gauche. Je me dois donc d'expliquer en quoi mon attitude a évolué depuis l'année dernière.
J'avais présenté, le mois dernier, deux questions que chacun devait à mon avis se poser pour décider de son vote. Comme je m'efforce d'être cohérent avec moi-même, je vais donner mes réponses à ces questions.
En premier lieu, ce texte est-il préférable à celui du traité de Nice? Mon "oui" est sur ce point sans équivoque. Parce que les avancées sont trop importantes et nombreuses et qu'elles me conduisent à réviser mon jugement de l'année dernière sur le simple "rabotage" des défauts les plus fâcheux du traité de Nice. D'une part, parce que Jean-Louis Bourlanges m'a largement convaincu de l'utilité de seuils de votes plus élevés que ceux de la double majorité au Conseil (le problème de la Commission demeure, par contre).
D'autre part parce qu'il y a, dans ce texte, nombre d'améliorations substantielles dont je percevais mal l'impact l'année dernière :
- une Charte des droits qui n'est sans pas la huitième merveille du monde, mais qui offre à la Cour de Justice de Luxembourg nombre de principes à saisir, comme le notait Mireille Delmas-Marty, pour faire évoluer sa jurisprudence dans un sens plus protecteur des droits des individus;
- un élargissement du droit des saisine des particuliers pour le recours en annulation devant la CJUE (article III-364), avancée qui était réclamée depuis longtemps par les juristes;
- l'ajout d'importantes clauses horizontales (c'est-à-dire qu'elles s'appliquent à toutes les politiques de l'UE) au début de la partie III, sur les aspects sociaux, sur la lutte contre les discriminations et sur les tant décriés "services d'intérêt économique général" (on se demande bien comment la jurisprudence administrative française a pu, depuis 80 ans, accoler le terme "commercial" à celui de "service public" sans provoquer d'émeutes devant le Palais Royal);
- la fin de la byzantine division en trois piliers, qui ne facilitait pas, c'est le moins que l'on puisse dire, la compréhension des institutions européennes;
- la publicité des votes au Conseil, qui permet d'espérer qu'il sera un peu plus difficile aux gouvernements nationaux de faire porter le chapeau à Bruxelles pour des décisions qu'ils auraient prises au Conseil; une meilleure information et un meilleur contrôle des parlements nationaux sur la législation européenne grâce aux protocoles n°1 et n°2;
- le renforcement incontestable du Parlement européen, qu'on aurait tort de croire impotent parce qu'il ne peut pas formellement proposer des lois. Alors que les parlementaires sont étroitement associés à la définition du programme législatif de la Commission. Alors, aussi, qu'ils peuvent demander à la Commission de proposer un texte sur un sujet, et qu'il arrive (si, si) que la Commission s'exécute (article III-332). Alors, enfin, qu'il bénéficie d'une arme atomique (la motion de censure) dont tant les textes d'application que la pratique prouvent qu'elle n'est pas réservée à la simple mise en cause de la seule gestion administrative de la Commission. D'ailleurs, on se demande bien pourquoi les couloirs du Parlement regorgeraient de lobbyistes si jamais l'institution était à ce point inoffensive;
- la possibilité d'instaurer des coopérations en matière de défense (article 41.6), qui ne doivent plus, comme pour le traité de Nice, être instaurée "dans le cadre" de l'OTAN -organisation qui n'est pas dirigée par les Américains, rappelons-le- (article 17.4 du TUE);
- le renforcement de l'Eurogroupe, désormais doté d'une existence institutionnelle et d'un président élu pour deux ans et demi. J'aurais vraiment souhaité qu'on aille beaucoup loin sur les questions de gouvernance économique, mais cette nouvelle disposition, pour être insuffisante, n'en est pas moins négligeable.
En second lieu, une renégociation rapide, qui corrigerait tout ou partie des défauts du texte est-elle possible? Sur ce point, la réponse est plus difficile, parce qu'elle dépend à la fois des défauts que chacun trouve au texte, et parce qu'elle est nécessairement une prévision par nature infalsifiable aujourd'hui.
A cet égard, la polémique sur le plan B a été, dans les deux camps, complètement absurde. Il est indéniable que, si jamais le processus de ratification devait échouer, plusieurs Etats pousseraient pour, au choix :
- un aménagement à la marge du texte, avec des protocoles destinés à rassurer les pays réticents, sur le modèle danois de 1992.
- un nouveau traité a minima qui tenterait de sauver du naufrage les dispositions les plus consensuelles du TECE, comme la création d'un ministre des affaires étrangères, les nouveaux seuils de vote au Conseil ou la désignation d'un président du Conseil européen.
- une constitution limitée aux parties 1,2 et 4 et qui laisserait l'essentiel de la partie III dans les traités précédents. Une telle proposition pourrait satisfaire, semble-t-il, une partie non-négligeable des noniens. Mais, comme le note justement Herman, elle supprimerait un bon nombre d'avancées contenues dans la partie III du TECE. Et, surtout, quoi qu'en disent ceux qui se gargarisent de la "constitutionnalisation" des politiques, elle ne changerait absolument rien à la valeur juridique suprême de cette partie III.
Là où les noniens se fourrent complètement le doigt dans l'oeil, et très profondément, à mon sens, est sur la probabilité que la crise soit salutaire est qu'elle débouche sur une constituante fortement marquée à gauche et/ou sur une renégociation où la France et ses alliés seraient en position de force pour transformer fortement la partie III. La constituante, sans filtre d'une CIG ultérieure, me semble exclue dans l'immédiat : la construction européenne actuelle est toujours basée sur le principe de double légitimité des Etats et du peuple européen, et je ne vois pas les nombreux partisans de l'intergouvernemental accepter un dispositif qui laisserait sur la touche les gouvernements nationaux. Et même si le principe d'une constituante était acceptée, je vois mal comment les partisans du "non de gauche" français et leurs alliés pourraient y être majoritaires.
Concernant une renégociation positive, elle me semble aussi très improbable au vu du rapport de force politique actuel en Europe. Si l'on peut espérer l'appui des gouvernements portugais et espagnols (et peut-être italien), on devrait aussi affronter un gouvernement allemand sûrement ancré à droite. Il faudrait, surtout, composer avec les Etats et les forces politiques européennes qui sont très réticentes à l'idée de l'Europe politique et qui se satisferaient aisément d'un statu quo niçois ou d'un traité de Nice retouché a minima.
Il y a un dernier argument qui me semble important : est-ce que l'adoption du traité constitutionnel aujourd'hui rendrait plus ou moins possible l'adoption, à terme, de la constitution européenne que j'appelle de mes voeux, c'est-à-dire une constitution avec un parlement encore plus renforcé, une commission qui achève sa mue en gouvernement européen, des politiques européennes relégués au rang de lois organiques et une révision à la supermajorité des Etats membres? En d'autres mots, est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux attendre, si ce texte est irréversible? C'est un argument utilisé, entre autres, par The Economist et par Bernard Salanié,
Je crois, au contraire, que le TECE offre des outils qui permettent une révision plus simple à l'avenir et qu'il offre des instruments renforçant la dynamique vers une Europe plus politique, et donc la probabilité que cette constitution ne soit pas la dernière. Les formes simplifiées de révision ont déjà été abordées sur ce blog. Ce qui me semble fondamental est le fait que le Parlement puisse avoir l'initiative d'une révision et que le Conseil puisse approuver cette initiative à la majorité qualifiée.
Les instruments qui permettent d'augmenter la place du politique dans le fonctionnement des institutions européennes ne sont pas moins essentiels. Il s'agit des protocoles qui permettent l'implication des parlements nationaux dans le processus législatif, la publicité des votes au Conseil, le renforcement du Parlement européen et le droit d'initiative citoyenne qui, s'il ne devait permettre que cela, renforcera les solidarités transnationales et l'implication des corps intermédiaires dans le processus législatif européen.
Il s'agit aussi du fait que le texte du traité constitutionnel, pour complexe qu'il demeure, se prête beaucoup mieux, parce qu'il est unique et mieux organisé, à une appropriation par les citoyens : mes souvenirs du référendum sur le traité de Maastricht sont assez vagues, mais il me semble que l'essentiel de la campagne s'était nouée sur les avantages et les inconvénients de l'adoption de la monnaie unique. Il n'y avait en 2004-2005 pas d'avancée équivalente dans son ampleur. Ce qui a conduit le débat à se focaliser sur la notion et sur le texte même de cette "constitution".
A cet égard, la campagne actuelle, malgré tous ses débordements et tous ses simplismes, offre au moins une raison d'être optimiste pour la suite, tant elle prouve que les citoyens savent, à l'occasion, se saisir d'enjeux qu'on disait trop complexes et trop rébarbatifs. Je ne suis pas souvent d'accord avec Raoul Marc Jennar et Etienne Chouard mais il y a un point sur lequel je les rejoins entièrement : trop souvent, des décisions fondamentales, qu'on qu'en pense de leur bien-fondé, sont prises par les gouvernements loin des peuples, loin des partis, loin des médias. Trop souvent, comme le reconnaissent d'ailleurs les responsables nationaux et européens eux-mêmes, la construction européenne a ressemblé à un despotisme éclairé, où l'on cherchait à faire le bien des peuples contre leur gré.
Une telle stratégie était sans doute nécessaire et légitime aux débuts des communautés européennes, tant l'antagonisme entre les peuples européens étaient vif (il faut se plonger dans les textes de l'après-Seconde Guerre mondiale pour avoir une idée de la virulence de la germanophobie, fort compréhensible d'ailleurs, des Français). Il est plus que nécessaire aujourd'hui de jeter une lumière crue sur les petits arrangements diplomatiques et les grosses manoeuvres des lobbies qui ont lieu quotidiennement à Bruxelles. Les instruments offerts par le traité constitutionnel permettent de le faire beaucoup plus et beaucoup mieux qu'auparavant.
C'est pourquoi je voterai "oui" demain. Sans enthousiasme démesuré pour le texte lui-même. Mais avec enthousiasme pour ce que ce texte permettra de faire s'il est adopté.
Maginot, le Retour
Je décide toujours mon vote le samedi à midi, quand la campagne est finie. Je me décide en fonction de mes convictions permanentes, et aussi sur les enjeux que la campagne a mis en avant.
Voici quelle fut ma réflexion hier :
- C’est le camp du NON qui a mené toute la campagne, imposé ses thèmes. Les Ouistes ont passé leur temps à leur courir après en disant « Vous avez raison dans votre argument, mais le TCE n’y est pour rien ou ne représente aucune menace réelle, soyez tranquille ».
- Le fond de la campagne ne portait pas sur le texte qui fut un prétexte. Les thèmes réels furent défensifs et pessimistes au fond. Alors que les récriminations et la morosité sont permanentes en France, on assistait à une défense pleine d’alarme de notre « modèle ». On va dans le mur, mais surtout qu’on ne nous demande pas d’infléchir le cap.
- au départ ce furent les thèmes de la gauche dite « de gauche », en résumé l’anti-capitalisme.
- Sur la durée, cependant, ce sont des images qui s’imposèrent et qui symboliseront quel que soit le résultat, cette campagne : la frontière qui protège, l’étranger vu comme menace, non comme source d’enrichissement et d’échange, dans la personne du mythique « plombier polonais ». Le vrai leader de la campagne fut en définitive Philippe de Villiers.
- La cohérence du NON existait bien. L’allergie à la concurrence et la dénonciation de la menace étrangère formant les deux faces d’un même objet, une sorte de national-communisme des années 2000, une resucée du programme De Gaulle-Thorez de 1945 révisé par Besancenot-de Villiers.
- Cette conjonction de la radicalité révolutionnaire et d’un nationalisme frustré est l’événement de ce printemps. Leurs acteurs ne s’en sont pas vraiment défendu, alors qu’un Non de gauche ne ferait que 30 ou 35% au grand maximum. Je rappelle (mais comparaison n’est pas forcément raison) le précédent historique du fascisme, Mussolini, activiste socialiste et pacifiste de premier rang, fondateur de Avanti, tombant dans la marmite du nationalisme.
Et ma conclusion :
Sur le texte, j’aurais eu tendance à un OUI mollasson. Fédéraliste européen , je suis loin du compte. Le TCE n’est qu’un pas dans la bonne direction. Pas de quoi d’ailleurs, justifier un référendum.
Mais sur le contexte, c’est sans hésitation OUI. Mais un Oui qui se retrouve lui-même …défensif et pessimiste :
« La nation dans notre tradition, n’est ni ouverte ni fermée, elle est projective : napoléonienne dans sa version guerrière ou hugolienne dans sa version romantique et pacifique » (Stéphane Rozès. Aux origines de la crise politique. Le Débat Mars-avril 2005).
A mon avis, il y a un tiers terme : la France rétro-projective de Maginot qui s’est exprimée à nouveau 70 ans après..
Rédigé par : Germain | 29 mai 2005 à 11:17
pfffffffff
Rédigé par : bouqui (;o)) | 29 mai 2005 à 11:29
Merci pour ton texte Emmanuel, je suis absoluement sur ta longueur d'ondes. Je rajouterai néanmoins quelque chose.
> une constitution limitée aux parties 1,2 et 4 et qui
> laisserait l'essentiel de la partie III dans les
> traités précédents. Une telle proposition pourrait
> satisfaire, semble-t-il, une partie non-négligeable
> des noniens.
C'est le scénario qui m'embêterait énormément (pour rester poli). On me propose trois pas ; mes compatriotes disent que ça ne va pas assez loin ; alors on me propose deux pas.
Si c'est ce scénario qui arrive et que les nonistes sont toujours nonistes, je pense que je les rejoindrais.
Si c'est ce scénario qui arrive et que les nonistes deviennent ouiiste, que faire ? Dire non parce qu'on n'est pas d'accord avec ce nouveau texte ou dire oui (« bah, c'est on a toujours le progrès des parties I et II ») et se sentir le dindon de la farce ?
PS: Dans ce cas, ne perd-on pas aussi les « facilités » de modification de la partie III ?
Rédigé par : Yannick | 29 mai 2005 à 16:30
Bonjour,
Je suis d'accord sur tous les points que tu as soulevés, à une exception près. Tu inclus dans les avancées substancielles apportées par le texte
"un élargissement du droit des saisine des particuliers pour le recours en annulation devant la CJUE (article III-364), avancée qui était réclamée depuis longtemps par les juristes;"
Il me semble que tu veux faire référence à l'article III-365, et non l'article III-364, mais il s'agit là d'un détail.
Sur le fond, je suis en désaccord avec toi : je ne crois pas que cet article apporte de grandes modifications par rapport à l'article 230EC, qu'il remplace. Comme tu le sais sans doute, la critique principale adressée à l'encontre de cet article était que les particuliers devaient montrer qu'ils étaient individuellement concernés par un acte européen pour avoir le droit de recourir cet acte en annulation. La cour de Justice européenne applique une interprétation extrèmement stricte de cette condition (depuis le fameux arrêt Plaumann). Ainsi, pour être individuellement concerné par un acte européen, un particulier doit prouver qu'il appartient à une catégorie fermée de personnes , c'est à dire que personne ne peut, même uniquement en théorie, être concerné par l'acte en question de la même façon que lui. Ainsi, si je suis un exportateur de clémentines et que je suis affecté par une loi européenne sur la production de clémentines, je ne serai pas considéré comme concerné individuellement car n'importe qui pourrait en théorie décider de se lancer dans le commerce de la clémentine, et ainsi être affecté par l'acte européen de la même façon que moi.
Or, l'article III-365 conserve cette condition (être individuellement concerné), sauf dans le cas d'actes "réglementaires", c'est à dire d'actes non-législatifs. Autrement dit, à moins que la cour de justice ne change son interprétation de "concerné individuellement", il sera toujours aussi difficile pour un particulier de tenter de remettre en cause une loi européenne qui l'affecterait.
Voila tout ça pour dire que je ne pense pas que l'on puisse faire de l'article III-365 une avancée majeure par rapport aux traités antérieurs.
Désolé si ça semble trop technique :-/
Je tiens à nouveau à souligner cependant que tous tes autres arguments me semblent très pertinents!
Rédigé par : Manu | 29 mai 2005 à 17:42