A une semaine du referendum, je fais comme Paxatagore une synthèse des raisons qui me pousseront dimanche prochain à glisser un bulletin oui dans l'urne.
Tout d'abord, je me situe dans le camps des européens convaincus. Ce titre d'Européen convaincu est très galvaudé actuellement, et même usurpé par des partisans du non qui jouent la carte du "j'aime l'Europe, je vote non". Cet argument ne tient pas la route, sauf à reconnaître que l'Europe dont il s'agit n'est celle que l'on va doter d'un nouveau traité, mais d'un projet autre, purement théorique, largement utopiste, et qui reste à formuler.
Quand je dis que je suis un européen convaincu, j'entends très clairement que le processus lancé en 1951 avec la CECA, qui a pris son envol en 1957, a pris un tour politique en 1992 avec Maastricht, et a fait en 1998 à Nice le pari de l'élargissement rapide, même si les réformes institutionnelles ont été bâclées et malheureuses, pur fruit du compromis diplomatique, me laissaient réservé, que ce processus disais-je, a mon entière adhésion.
Dès lors, avant même que le projet de "Constitution" ne soit rédigé, j'avais un a priori plutôt favorable. Mon état d'esprit était : "Je voterai oui sauf si ce texte me donne de bonnes raisons de voter non".
Pourquoi ? Parce que la méthode européenne a tout pour me plaire, moi qui me méfie jusqu'à l'hostilité des idéologies et des utopies, qui ont tant fait saigner l'Europe en un siècle, et entretenu un état de guerre permanent pendant deux mille ans. Au rang de ces idéologies, je mets d'ailleurs le patriotisme révolutionnaire dont les souverainistes se réclament encore volontiers aujourd'hui. A un mort pour la France, je préfère quelqu'un qui vit pour lui même.
Or cette méthode européenne s'est fondée sur un pragmatisme dégagé de toute idéologie. Quel est le but ? Empêcher la guerre, le plus longtemps possible. Comment ? En la rendant impossible. Et par quels moyens la rendra-t-on impossible ? Comment faire que les Européens cessent de se voir comme des ennemis mutuels ? Créer de toutes pièces des Etats Unis d'Europe était impossible. Les peuples européens n'étaient pas prêts, ne le voulaient pas. Alors ?
En en faisant des cocontractants. En rendant les économies si interdépendantes, si inextricablement imbriquées, que se faire la guerre devient un suicide économique. C'est la création du marché commun. Si les Etats continuent à exister, leurs ressortissants pourront désormais aller s'installer où ils veulent, y exercer l'activité économique de leur choix, sans plus de restriction que s'ils étaient un des nationaux du pays où ils se sont installés. Mais pour que ça marche, il faut une règle du jeu essentielle : que les Etats ne favorisent pas pas des subventions déguisées leurs entreprises nationales aux dépens de celles des autres pays.
Pour parvenir à cet objectif, la meilleure méthode a paru celle de l'unification des règles dans un sens de diminution des entraves. Permettre une intervention économique massive des Etats en assurant malgré tout une égalité des acteurs économiques était impossible, sauf à instituer un GOSPLAN européen. Le principe a donc été l'interdiction des interventions faussant le jeu de la concurrence, des exceptions étant prévues pour les services publics, les fameux SIEG, qui ne sont pas une invention du TECE, soit dit en passant. Mais comme pour toute exception, leur domaine a été soigneusement délimité, pour empêcher toute tentation d'un Etat de fausser les règles de la concurrence au profit de son économie, ce qui entraînerait une riposte équivalente des autres Etats et l'échec du projet européen. Projet européen, qui est, répétons le encore une fois tant ça semble avoir du mal à entrer dans certaines têtes, est de rendre toute guerre impossible, et non d'assurer le triomphe du marché et de l'ultralibéralisme. Certaines politiques ont d'ailleurs largement dérogé à ce principe, en devenant au contraire des politiques de pure intervention économique diamètralement opposées au libéralisme : la PAC, politique agricole commune, en est l'exemple emblématique, qui maintient des cours artificiellement élevés en subventionnant des exploitations agricoles en surnombre, et étouffe ainsi les agricultures des pays pauvres qui ne peuvent exporter leurs produits pourtant bien moins chers vers l'Europe (non, je n'aime pas la PAC, couteuse et inutile, et qui n'empêche pas qu'un agneau élevé et tué à l'autre bout du monde qui arrive par bateau coute deux fois moins cher au kilo que de l'agneau européen subventionné à mes frais. Vous ai je dit que j'ai mangé un délicieux gigot néo zélandais à 6 euros le kilo aujourd'hui ?).
Et, quoi que peuvent dire, et inventer les adversaires de ce projet, ça marche. Pour la première fois en deux mille ans d'histoire, l'Europe, au sens de pays membres de l'Union Européenne, n'a pas connu de guerre pendant cinquante années. La France, l'Allemagne, l'Angleterre et la Hollande ne se sont pas fait la guerre pendant 50 ans.
L'Europe n'a pas été totalement à l'abri de la guerre. Il y a eu la guerre froide. Aujourd'hui, nous avons fait la paix avec ces pays et les intégrons à l'Union Européenne. Trois nouveaux Etats membres ont fait partie un jour de l'URSS, rappelons le !
Il y a eu la Yougoslavie, en plein coeur de l'UE, puisque ce pays était bordé par l'Italie, l'Autriche eu nord, et la Grèce au sud. Cette guerre civile n'a fait que renforcer à mes yeux la valeur du projet européen, qui a étouffé en son sein, je l'espère à tout jamais, les tensions nationalistes qui ont mis ce pays à feu et à sang. Elle a révélé aussi la cruelle impuissance de l'Europe qui a été incapable de mettre fin à ce conflit, faute d'avoir développé une union politique et militaire. Ce n'est pas faute d'avoir essayé : l'idée, lancée par la France, a été coulée par le refus de la France en 1954. 50 ans après, rien n'a été tenté dans ce domaine jusqu'à ce projet de constitution. Cela devrait faire réfléchir les amateurs de non créatif et de plan B panacée.
Voilà dans quoi s'inscrit ce projet de constitution. Voilà d'où vient mon enthousiasme initial et mon a priori favorable. Je veux que la construction continue, et aille de l'avant.
Alors, que contient ce traité constitutionnel, et y a-t-il de quoi me faire changer d'avis ?
Son idée première est de réunifier les diverses communautés et leurs traités respectifs en une seule communauté. Pour plus de détail sur le fait qu'il n'existe pas une mais plusieurs communautés européennes, voir cet excellent billet de Paxatagore. Je ne puis qu'adhérer au principe.
L'UE profite de cette réécriture gigantesque, confiée pour la première fois à un organe ad hoc, la Convention, pour réformer les institutions par petites touches, comme cela fonctionne depuis 50 ans.
Le Conseil, organe central de l'UE, composé des gouvernements des Etats membres (chef du gouvernement ou ministre compétent suivant les questions abordées), se voit doté d'un président à plein temps, alors que cette fonction est aujourd'hui exercée par le chef de gouvernement d'un Etat membre, à tour de rôle, soit 6 mois tous les 12 ans et demi. La fin de la présidence tournante m'enthousiasme.
Le Parlement européen (PE) voit ses prérogatives élargies, sans acquérir encore un rôle essentiel. Mais les raison en sont à mon avis un effectif pléthorique (732 aujourd'hui, qui passera à 750, qui fait que l'essentiel des moyens humains du parlement sont consacrés à son fonctionnement ordinaire), à comparer avec la Chambre des Représentants des Etats-Unis qui compte moins de 450 représentants et a un pouvoir plus important, sans compter qu'ils parlent tous la même langue, et qui empêche une certaine personnalisation du Parlement, et le fait que le PE soit aussi un lieu de villégiature pour politiciens en panne de mandats internes (rappelons qu'aucune tête de liste des élections de 1998, sauf Jean-Marie Le Pen, n'a jamais exercé le mandat qu'elle sollicitait). Le TECE ne résoud pas ce problème, mais ce n'est pas une raison pour voter non : le problème existe déjà avec le traité de Nice.
Qu'est ce qui m'a déplu dans ce Traité ?
Le fait de l'appeler Constitution alors que ça n'en est pas une. Je suis un fédéraliste, c'est à dire que je pense et espère que cette construction aboutira à la naissance d'un Etat fédéral européen. Mais ce TECE ne franchit pas ce pas, et on en est encore loin (je ne suis pas sûr de voir cet Etat naître de mon vivant...). Alors appelons un chat un chat et un traité un traité. Le débat promettait d'être déjà assez complexe pour ne pas en plus embrouiller l'esprit des électeurs en baptisant constitution un texte qui n'en est pas une. Ca n'a d'ailleurs pas manqué, cette ambiguïté a été largement exploitée par les nonniens, et c'est de bonne guerre.
Cette dénomination entraine un florilège de blabla sans grand intérêt ni même de sens, comme la reprise de la citoyenneté européenne (créée par le traité de Maastricht en 1992) qui existe mais sans avoir la moindre conséquence juridique, la désolante devise de l'Union 'Unis dans la diversité", formule creuse qui marche dans les deux sens (Divers dans l'Unite, ca marchait aussi).
Le fait aussi que droite libérale et gauche européenne (à laquelle je joins l'UMP, puisque notre Président a décidé que le libéralisme était l'ennemi) ait chacun voulu inscrire dans ce texte des préceptes à eux qui aboutit à des formulations sans queue ni tête comme la désormais célèbre "économie sociale de marché hautement compétitive", qui permet aux ouiste béats d'y voir ce qu'ils veulent, et aux nonniens méfiants d'y voir ce qu'ils abbhorent (que ce soit le libéralisme ou l'europe sociale).
Le prix de ce salmigondis risque d'être élevé au soir du 29 mai si le non l'emporte.
Je reste réservé sur la Charte des droits fondamentaux. Gadget ou révolution ? J'opine plutôt vers le gadget eu égard à sa portée limitée (elle ne concerne que les Institutions et les Etats membres dans leur relation avec icelles). Mais je sais d'expérience que la Cour de Justice de Luxembourg (Cour de justice des communautés européennes aujourd'hui, Cour de justice de l'Union Européenne peut être demain) peut lui donner une portée insoupçonnée. Auquel cas je serais ravi, son contenu me convient tout à fait, puisqu'elle n'invente rien pour l'essentiel. Le droit à la vie anti avortement ne tient pas la route, ce sujet a déjà été traité ici, quant à la dernière trouvaille selon laquelle il ne contient pas le droit de chacun à disposer de son propre corps, d'une part, ce droit n'existe pas en France non plus, et d'autre part, je ne vois pas ce que cela a à voir avec l'Union européenne. Essayer de faire passer le titre II pour une déclaration mettant en péril des droits déjà existant et reconnus est une supercherie grossière.
Et quid des arguments les plus entendus ?
La menace sur les services publics ?
Les services publics ne sont pas menacés. Cela fait longtemps que l'UE a contraint les Etats membres à cesser de baptiser "service public" des pans de l'économie où l'Etat n'avait pas à intervenir. Pour les services public purs, ils sont expressément protégés, les subventions étant autorisées, sous réserve qu'elles contribuent bien à ce service et ne soient pas des subventions déguisées. La RATP est un service public, Air France, non. La Poste est un service public, mais certaines de ses activités ne le sont pas (Chronopost, par exemple, doit être en concurrence avec UPS, Fedex ou DHL). Son activité bancaire est bâtarde : elle est un service public dans les petits villages, ou vis à vis d'une clientèle démunie ; les aides de l'Etat doivent servir à rétablir les pertes inhérentes à cette activité, sans la favoriser au détriment des autres banques, par exemple, en étant la seule à pouvoir proposer un service attrayant par autorisation de l'Etat.
Les politiques économiques qui ne sont pas à leur place et seraient ainsi écrites dans le marbre pour les siècles des siècles ?
L'Europe s'est contruite sur l'économie, je l'ai expliqué au début. Ces politiques sont dans les traités depuis le début. Et c'est bien beau que des Etats créent ansi une entité supranationale, mais encore faut-il savoir à quoi elle sert, ce qu'elle peut faire, et ce qu'elle va faire. Cette présence est une sécurité pour les Etats membres, qui ne délèguent pas des pans de leur souveraineté en signant un chèque en blanc. Le fait qu'elles soient "écrites dans le marbre" est faux, puisque le TECE prévoit les modalités de sa révision ; affirmer que matériellement, une telle révision serait impossible est une pure affirmation péremptoire, démentie par le fait que précisément ce traité a été signé par les 25 pays membres.
L'Europe ultralibérale nous livrant pieds et poings liés aux multinationales ?
Ce n'est pas parce qu'un texte parle de concurrence et de compétitivité qu'il est libéral. La PAC est l'anti-exemple parfait, les subventions autorisées pour les services publics aussi. L'Europe se bâtit en rendant les économies interdépendantes, le meilleur moyen pour cela est de créer un marché unique. Qui dit marché dit concurrence. Il est bon aussi que l'UE exporte ; pour cela il faut être compétitif. Si on vend des voitures dix fois plus chers qu'ailleurs, personne ne nous les achètera. C'est du B.A.BA. Quant aux multinationales, là, on est dans le fantasme, ça ne m'intéresse pas. Vous n'avez qu'à demander à Microsoft, multinationale s'il en est, s'ils pensent que l'UE leur est livrée pieds et poings liés.
Je ne parle même pas de la campagne d'ATTAC, que Versac a traitée, qui est une injure à l'intelligence et de la démagogie écoeurante.
C'est donc peu dire que les arguments des nonniens ne m'ont pas convaincu. Ils ne m'ont même pas ébranlé.
Ce fort long billet est moin humble point de vue, et l'analyse de mon for intérieur sur les raisons qui me feront glisser une bulletin oui dimanche prochain. Il ne vise pas à être une démonstration. J'avertis donc les nombreux commentateurs qui semblent prendre un certain plaisir à systématiquement mettre en cause la sincérité des auteurs de ce site : je n'hésiterai pas un instant à faire le ménage en commentaires. Ne perdez pas votre temps à rédiger des attaques personnelles, elles finiront à la poubelle.
Cath :
"le libéralisme dit qu'il est le système le plus efficace."
Le Libéralisme dit que personne mieux que vous ne peut savoir ce qui vous convient . C'est tout.
Rédigé par : Nade | 24 mai 2005 à 01:14
@jmo
Je sais bien qu'il est d'usage de formater le réel pour faire avancer ses idées, que le fait que la commission fasse ce qu'elle peut face à Microsoft est très dérangeant pour ceux qui estiment que l'UE est un cheval de Troie visant à nous inféoder au Kapital et aux multinationales apatrides, mais quand même, y en a marre des mensonge récurrents !!!!!!!!!!!!
"Mais bon, l'expert qu'est Eolas aurait quand même du savoir que les derniers arbitrage de la commission sont largement favorables à Microsoft !!"
De quoi, kescekytepermet ?
"La Commission européenne a donné à Microsoft jusqu'à la fin du mois pour présenter des propositions satisfaisantes qui lui permettront d'éviter des sanctions pour abus de position dominante, a annoncé lundi un porte-parole de l'exécutif, Jonathan Todd.
Le fabricant de logiciels américain pourrait écoper d'une amende allant jusqu'à 5% de son chiffre d'affaires mondial quotidien par jour de retard sur la mise en oeuvre des décisions de Bruxelles."
http://fr.news.yahoo.com/050523/5/4fgy8.html
@margit trop facile (quand y a le mot capital, hein...)
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 10:09
@ margit :
"Qui a dit : La situation la plus favorable pour le travailleur est celle de la croissance du capital ?"
(Pas trop facile pour moi, eviv.)
Je ne sais pas mais ça ne dit pas grand chose. Les phrases isolées de leur contexte ne servent bien souvent que de manière bien limitée un argumentaire, me semble t-il. Fusse t-il à prétention de moquerie, comme je pressens le votre.
Ce que ça me dit, aujourd'hui où les revenus du capital rapportent plus que la force de travail, c'est que ça n'est plus vrai. Aujourd'hui où même travailler ne suffit pas pour vivre d'une manière stable financièrement, hors du manque et dans de bonne conditions de santé.
Si c'est Karl Marx qui a dit ça, je perçois encore mieux votre volonté de brocardage tout autant que la vision étriquée, caricaturale et volontairement entretenue par vous comme limitée de la position de ce que vous considérez comme vos adversaires (les votants "non").
Vous vous engouffrez dans le mirage le plus destructeur (au sens du sens, justement) de la norme du paysage politique : caricaturer et réduire, ridiculiser et rabaisser pour mettre en valeur sa position.
Rédigé par : bougui | 24 mai 2005 à 10:20
@bougui
Le vote "marxiste", enfin ceux qui considèrent que Karl a posé les jalons d'une vraie politique économique possible, bref, PCF, LO, PT et LCR (et une pertie, mais une partie seulement d'attac) sont une des 3 composantes du non !!
Ces forces là représentaient 45 % du vote de gauche en 2002 (55% pour jospin + Taubira +Mamère), donc on caricature pas du tout :-)))
"Ce que ça me dit, aujourd'hui où les revenus du capital rapportent plus que la force de travail, c'est que ça n'est plus vrai."
Voili ça c'est typique du discours marxiste de base "force de travail", tout ça.
Le votants non sont effectivement mes adversaires, si je partage le sentiment et la réalité du "ca va mal", j'essaye de proposer des solutions, de ne pas rester dans schémas idéologiques datant de 2 siècles (et déjà ineptes à l'époque) et de ne pas me tromper de coupable. Ne pas participer de la destruction d'une des plus belles choses faites dans l'histoire...
Putain, que je vais l'avoir mauvaise ce dimanche soir.
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 10:45
« typique du discours marxiste »
Eviv anathémise. Le capital ne fournit plus de revenu ? il n'utilise plus de force de travail ?
Cetet habitude de juger une phrase sur son aspect, sur des mot-clés, sur des associations d'idées… et non sur son contenu est constitutive de la réduction, de type télévisuelle, du débat à la confrontation de slogan.
DOnc à mon tour : laissons la peur du rouge aux bêtes à cornes.
Rédigé par : Cobab | 24 mai 2005 à 10:53
@ Eviv
Ah oui, je suis sur que Microsoft tremble devant la commission. Allez, j'intègre un petit navigateur autre qu'IE dans mon système, un autre lecteur multimédia (au hasard RealPlayer) et le tour est joué ! Je ne suis plus en position dominante.
C'est le scénario qui s'est produit au US et qui a toute les chances de se reproduire ici.
Par ailleurs, Môsieur Eviv Bulgroz, kescekytepermet de me traiter de menteur récurrent.
La contreverse qui oppose la commission et Microsoft sur sa position dominante date de mars 2004. L'adoption de la directive sur les brevets logiciels du 7 mars 2005.
Un bon point pour toi, la commission vient de durcire très récemment sa position dans la contreverse position dominante. Mea Culpa. Honte à moi, l'ignorant.
Néanmoins, je m'étonne que la commission devienne aussi sévère avec Microsoft à 6 jours d'un scrutin important, alors même qu'une grande partie des partisans du logiciel libre s'appretent à voter non du fait de son adoption de la directive de BL.
C'est marrant ca. Y-a des directives que l'on repousse à plus tard, mais des positions fermes qui ne peuvent plus attendre, même si les procédures engagées datent de plus d'un an.
Allez, va y, fait tourner ta machine à formater la réalité !
Rédigé par : jmo | 24 mai 2005 à 11:05
Pfeuh :-)
La force du travail et l'exploitation concomitante du travailleur ne sont pas les 2 mamelles du discours marxiste ?
Mais PCF+ LCR+ les autres c'est quoi leur discours , hein? Ils n'existent pas ? Ce ne sont pas les forces politiques qu'on entend le plus dans le non ?
Vaine tentative de camouflage.
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 11:05
@jmo
"Un bon point pour toi, la commission vient de durcire très récemment sa position dans la contreverse position dominante. Mea Culpa. Honte à moi, l'ignorant."
C'était sur ce point où je te traitais de "menteur". Dont acte c'était de l'ignorance en fait.
La commission ne va pas faire disparaître Microsoft, m'enfin. Elle tente de préserver la concurrence libre et non faussée (sur les logiciels tiers):-))). Pour les OS Linux et Mac ne sont pas interdit en UE que je sache.
Bon et la théorie du complot, la commission se réveille juste avant le référendum français.... Pfeuh, là aussi c'est faux, cette histoire traîne depuis des années, avec des rebondissements mou épisodiques. Et ça me rappelle trop la période de l'histoire où l'homme pensait que la terre était le centre de l'univers.
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 11:11
@ Eviv
Face aux forces marxisantes, aux souverainistes et aux fachos qui vont prendre le pouvoir au soir du 29 mai (ne me demande pas comment ils vont faire pour s'entendre ensemble), je ne vois plus qu'une seule solution pour toi: l'exil.
Et je te comprendrais, si les français sont aussi bêtes pour voter Non, il ne te mérite pas :-)))
Rédigé par : Krysztoff | 24 mai 2005 à 11:12
@ Krystoff
Greuh :-)))
Vu les (très modestes) perspectives professionnelles que m'offrent ce pays comparativement, je pense plutôt que c'est moi qui ne mérite pas la France.
Je n'aime pas les extrêmes, leurs discours, leur démagogie, leurs simplifications, les peurs qu'ils agitent, les propos rances qu'ils tiennent (en surfant sur la xénophobie locale qu'on ne va pas contester, si ?), les faux coupables qu'il désignent (mondialisation, élargissement) etc.
Je constate que ces partis parviennent à regrouper plus de 30% de votants sans trop de pb. Ca ne me rend pas très fier de mon pays. Que leur discours devient de plus en plus dominant. Alors peut être suis-je simplement un sale prétentieux qui ferait mieux de se casser. Néanmoins je défendrais le plombier polack jusqu'à mon dernier souffle, na ! :-)
Et ne me fais dire que je suis un admirateur béat des partis traditionnel dans cette histoire, ni que je pense qu'il faille accepter n'importe quel traité. Je trouve simplement effectivement la campagne très caractéristique du chauvinisme français.
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 11:27
@ Eviv
Je crois que là on nous sommes en désaccord (mais tu n'es pas le seul, je relève ce sentiment chez pas mal de commentateurs et parfois même, je le soupçonne chez certains de mes co-auteurs), c'est sur cette soi-disante spécificité française composée de chauvinisme, de populisme et d'arrogance. Ca me fait toujours penser à ce désormais article célèbre d'un certain Sollers, Philippe de son prénom, sur la France moisie.
Je crois, et j'en ai quelques confirmations factuelles, que si un tel débat, qui certes connait parfois des dérives, dérives qui s'accélèrent à mesure que l'échéance approche, l'enjeu devenant crispant y compris pour les esprits rationnels, mais où on a souvent malgré tout débattu du fond et du texte, si un tel débat donc se déroulait dans n'importe quel pays de l'Union, on aurait de la même façon des dérives nationalistes, populistes...
Pourquoi croire que les français seraient soit les seuls soit les pires à se complaire dans le chauvinisme de bas étage, à céder aux sirènes fascisantes et nationalistes? Certains anglais ne sont pas aussi voire plus nationalistes? Et quid de certains belges (flamands en l'occurence) ou hollandais, ou encore autrichiens quant à leur populisme xénophobe et fasciste? Ne voit-on pas resurgir avec inquiétude des mouvements politiques fascisants en Allemagne, en particulier à l'Est? Serions-nous les seuls égoïstes et tous les autres de grands humanistes altruistes?
Certes cela ne nous excuse en rien. Mais je ne suis pas particulièrement adepte de l'auto-flagellation. Et que je sache, contrairement à d'autres pays européens, jamais Le Pen ou ses sbires n'ont été à un gouverment, ni encore moins en position de conquérir le pouvoir.
Rédigé par : Krysztoff | 24 mai 2005 à 11:49
@Krysztoff
Ok j'y vais un peu fort, je le concède volontiers :-) Mais :
- La campagne à commencer l'affaire Bolkstein, pas de façon ni propre ni finaude ni dépourvue de xénophobie, tu me le concédera ? Franchement c'est à ce moment là où je suis devenue fou furieux.
- J'ai vécu à l'étranger : xénophobie, racisme, peur de l'autre ou des autres sont des chose partagées. Mais elles ne trouvent pas nécessairement leur expression dans les votes de façon si forte et longue qu'ici. Et de pseudo justification sociale en faisant croire que le chômage c'est la faute à l'étranger. F. Raynaud se moquait deja de ce travers d'ici, hein
- Demande (sans trop parler la langue, et même la parlant pour Paris) ton chemin dans Paris/Londres/Madrid/Athènes ou Berlin... Tu verra une différence.
Mais bon je ne suis pas en désaccord avec toi, les "autres" ne sont pas blanc comme neige. Ce n'est pas une raison justifiante :-)
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 12:00
@ eviv :
"Le vote "marxiste", enfin ceux qui considèrent que Karl a posé les jalons d'une vraie politique économique possible, bref, PCF, LO, PT et LCR (et une pertie, mais une partie seulement d'attac) sont une des 3 composantes du non !!
Ces forces là représentaient 45 % du vote de gauche en 2002 (55% pour jospin + Taubira +Mamère), donc on caricature pas du tout :-)))"
Bien sûr que si, puisque tu assimiles encore une fois les électeurs avec le drapeau pour lesquel ils votent. Combien sont en France les lecteurs du "capital" ? Combien sont-ils à maîtriser vraiment la pensée marxiste, au-delà de tous les raccourcis et les amalgammes issus de la posture de ceux qui croient savoir parcequ'ils entendu dans la bouche de quelqu'un auquel ils accordent un crédit particulier ?
Pas beaucoup. Je ne me considère pas comme marxiste, parceque j'ignore sa pensée. Je parle de force de travail et de capital simplement parceque ce sont des catégories opératoires quand il s'agit de penser l'économie. La force de travail existe, le capital aussi. L'emploi de la force de travail ne suffit pas aujourd'hui toujours pour s'en sortir mais une part de capital fait récolter plus qu'il n'en faut. Ce sont des faits, me semble t-il, mais n'hésites pas à me dire qi j'ai tort.
Je suis sans doute victime de la propagation propagandiste vicieuse des idées marxistes depuis plus d'un siècle, tout comme les électeurs qui votent "marxiste" en ignorant comme moi de quoi il s'agit vraiment.
On dis toujours : faut pas donner de conseils, c'est pas bon de donner de conseils, fau(t pas conseiller. Reçois donc mon conseil : sors un peu de ce que d'aucun nomme "tour d'ivoire" : ta grille de lecture du paysage politique est me semble t-il largement trop influencé par tes compétences savantes. Ces dernières ne sont absolument pas une tare, bien au contraire (c'est ce qui donne à Publius une bonne part de sa qualité) mais n'est pas non plus une panacée (c'est ce qui fait que nombreuses sont les contributions sur Publius qui pointent, souvent maladroitement -je suis concerné- le caractère par trop intellectualisant de certaines réflexions).
Un exemple caractéristique : le débat arrive sur le marxisme. Il semble bien naître entre toi, margit et moi. Qui arrive, porteur de la parole légitime, se substituant en quelque sorte à ma position : krysztoff, qui disait ailleurs être le seul des neufs à considérer la grille de lecture marxiste comme enbcore utile pour décrypter et produire une analyse opératoire du monde social.
Les caractéristiques universitaires de nombre de participants semblent bien constituer un cercle particulier d'échange. Ce que je ne déplore pas, même si je ne suis pas concerné n'étant pas universitaire.
Mais je considère (peut-être un peu idéalement) qu'un intellectuel, payé pour produire du discours censé enrichir le reste de la société -de diverses et multiples manières dans les fait, sans doute- se doit de se donner les capacités de délivrer sa parole et sa perspective autrement que dans un jargon de spécialiste, qui est utile et nécessaire mais seulement, justement, dans l'"entre-soi". Ce qui n'est pas le cas et ne peut pas être le cas sur internet, à moins de l'expliciter.
Rédigé par : bougui | 24 mai 2005 à 12:37
@ bougui
Mais je ne me substitue à personne moi! Je ne porte aucune parole légitime. Et je ne suis pas universitaire, ni même intellectuel. Simplement citoyen, enfin j'essaie. Et je n'ai pas l'impression que les billets que j'écrive ou que les commentaires que je poste, en parfaite égalité avec tous les autres commentateurs en l'occurence, ne transpirent d'une quelconque supériorité intellectuelle.
Mais excuse-moi de m'être incrusté dans un débat entre eviv, margit et toi...:-))
Rédigé par : Krysztoff | 24 mai 2005 à 12:48
]@ krysztoff :
mes excuses, j'ai bougné mes ascuriades. Tu as raison. Mais au-delà de mes erreurs, cernes-tu l'intention ?
Rédigé par : bougui | 24 mai 2005 à 12:54
A jmo, Quoique, machin :
- Eolas est libéral, soit, je le laisserai s'exprimer avec précision sur ses convictions, et les défninir, mais il ne s'en est jamais caché.
- Il n'avance pas "à demi-masqué", et Publius n'est pas "noyauté par les libéraux". Nous avons depuis le début un lien vers nos blogs personnels (en bas à droite), qui permet à chacun de découvrir les positions et passions des auteurs.
- Ces méthodes de demandes d'explications publiques me font penser à un tribunal douteux.
- Vous êtes effectivement ici un peu chez Eolas (à 1/9ème en tout cas), il n'est donc pas sommé de s'expliquer, mais apte à effacer les commentaires insultants ou aggressifs à son égard.
Encore une fois, je vais revenir sur les règles de ce blog :
- nous somems 9 auteurs. Chacun a ses sensibilités politiques, et la liberté de les exprimer.
- Chaque auteur dispose de cet espace pour écrire en toute liberté. Aucune coordination n'est réalisée, sauf pour, de temps en temps, décider qu'on écrira un post sur tel sujet, ou telle réponse au courrier des lecteurs.
- C'est Emmanuel qui a écrit la note "vous avez- dit ultralibéral ?", et Eolas, à ma connaissance (je ne le fréquente que depuis un an et demi) n'est pas "ultralibéral", d'ailleurs. Aucune incompatibilité, donc. "Publius" n'écrit rien, ce sont ses auteurs qui s'expriment dessus.
- Noyauté, Publius l'est peut-être, mais alors en aucun cas par les libéraux (un pauvre exemplaire, certes brillant, parmi neuf sombres sociaux-démocrates). Nous n'avons demandé à personne de jurer sur l'honneur n'appartenir à aucun groupuscule fasciste ou trostkiste avant d'intégrer Publius. (pour ma part, mon frère était lambertiste, mais je me suis soigné ;)
- le 'groupe' constitué par les auteurs de Publius n'a aucune voix commune, et s'est constitué de manière non réfléchie, à partir d'une simple note, accessible publiquement (ça vous évitera de chercher quel complot a été monté !) :
http://vanb.typepad.com/versac/2004/11/et_maintenant_l.html
Donc, une fois pour toutes, cessez ces méthodes fascistes et d'exclusion. Il vous suffit de ne pas venir ici, si vous n'êtes pas satisfaits de la pluralité de ce blog.
Rédigé par : versac | 24 mai 2005 à 13:04
Bravo, versac. Je m'apprêtais à répondre au courageux et anonyme machin qui me semble avoir toutes les capacités pour devenir procureur dans un régime stalinien.
Je n'ajouterai qu'une chose : bien que n'étant pas libéral, je me trouve d'accord avec l'essentiel de ce que dit Eolas sur le TECE, aussi bien d'ailleurs qu'avec la prise de position de Judith Bernard sur BBB, et d'autres « oui » encore de toutes obédiences, à partir du moment où il défendent le TECE sur des positions dépourvues de chauvinisme ( je ne vais pas réciter ici toutes les mauvaises raisons de voter oui pointées par ailleurs). Ce qui prouve que le TECE est une excellent compromis, pouvant être accepté pratiquement dans les même termes par tout un éventail de tendances politiques non seulement en France mais en Europe. Compromis qui offre (offrait ?) l'opportunité de faire un pas en avant significatif (petit, mais symbolique et déterminant pour l'avenir). Ce compromis ne pourra pas être réunis de sitôt, peut être même pas à l'échelle d'une vie humaine, et peut être même jamais plus du tout au rythme ou change le monde. Je conjure le nonistes européens sincères de bien y réfléchir.
Rédigé par : indigne | 24 mai 2005 à 13:47
@bougui
"Bien sûr que si, puisque tu assimiles encore une fois les électeurs avec le drapeau pour lesquel ils votent. "
Ce n'est pas UNE seconde la question. Ils votent pour ces gens. Que se soient au 2 degré, au 8 eme, par malentendu, par bêtise crasse ou intelligence supérieure, n'est pas le problème. Ils votent pour ces gens, là. Ca donne un sens, sinon c'est nier la démocratie.
C'est le même discours déculpabilisant qu'on entend dans le camp d'en face, hein :-)
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 24 mai 2005 à 14:16
"Ils votent pour ces gens. Que se soient au 2 degré, au 8 eme, par malentendu, par bêtise crasse ou intelligence supérieure,"
ou par défaut ?
Rédigé par : Cobab | 24 mai 2005 à 14:31
eviv, si tu votes OUI dimanche , tu voteras pour chirac ???
Rédigé par : jérôme | 24 mai 2005 à 14:32
FEU L'UNION EUROPEENNE?
Même si le oui devait de justesse l'emporter, l'immense étendue en France des réactions négatives, effrayées, indignées face à un traité constitutionnel pourtant plutôt timide, et clairement dans la continuité des traités antérieurs, serait déjà le signe d'une profonde désaffection face à ce qui fut au coeur de sa politique nationale durant près d'un demi-siècle. Le risque d'un tournant fondamental dans l'aventure de la construction européenne est donc extrêmement élevé, et c'est d'ailleurs ce que préconisent de plus en plus ouvertement la plupart des partisans du non, qui reconnaissent souvent que l'assaut contre le TCE est surtout un moyen d'ouvrir la brêche: l'objectif est la mise à bas de l'édifice patiemment construit depuis 1957.
Presque tous se récrient certes: nous sommes Européens, nous voulons simplement une "autre Europe". Cela a à peu près autant de valeur pratique que se dire "pour la paix, contre la guerre" ou "pour la prospérité, contre la misère". Le seul projet alternatif un tant soit peu élaboré, celui mis en circulation par ATTAC, ne résout aucunement le dilemme fondamental des "non de gauche": obtenir la garantie d'une sauvegarde des systèmes sociaux nationaux, et simultanément accorder la prééminence au Parlement européen sur les représentants des Etats membres. Par ailleurs les principes et politiques préconisés sont si "progressistes" qu'ils ne pourraient évidemment pas servir de base à un nouveau compromis, aucun des 25 Etats -pas même la France- n'étant disposé, dans un avenir prévisible, à les reprendre à son compte. L'"autre Europe" est un effet de discours, un instrument de propagande, ce n'est pas un projet viable. Passons sur son improbable compatibilité -même au niveau du discours- avec le non souverainiste et/ou de droite, largement majoritaire à l'échelle européenne dans le camp des opposants au TCE.
Le plus vraisemblable, à ce jour, est que le traité constitutionnel, manifestement trop compliqué à faire passer, soit purement et simplement abandonné - comme cet autre projet d'initiative française, la Communauté Européenne de Défense (CED), il y a exactement cinquante ans: on n'y est jamais revenu. Mais, au-delà, ce qui pourrait se propager rapidement parmi les promoteurs mêmes de la construction communautaire, c'est le sentiment délétère de l'"à quoi bon se fatiguer à négocier interminablement des avancées européennes, si tant de citoyens n'en veulent pas, et de plus nous en tiennent électoralement rigueur?". Le TCE n'a pas été rédigé en cinq minutes sur un coin de table par une faction de comploteurs vendus à Bush et au Grand Capital: il a absorbé quatre ans d'énergie de certains des meilleurs parmi les Européens convaincus. Croit-on qu'ils se remettent à la tâche sans désemparer? Pourrait-on si aisément les remplacer - et, surtout, par qui?
Avant même la décolonisation, avant même la chute du communisme en Europe, les opinions concernées, et leurs dirigeants, s'étaient insensiblement faits à l'idée que le jeu n'en valait plus la chandelle, que le rapport coûts/bénéfices de l'empire colonial ou du système communiste devenait par trop défavorable. On avait cessé d'y croire, on n'en attendait plus rien - et ils ont disparu, très vite, avec étonnamment peu de résistances. L'histoire est faite de ce genre de dynamiques, positives ou négatives, auxquelles il est très difficile de résister une fois qu'elles sont enclenchées.
C'est une semblable dynamique de désagrégation qui pourrait être en train de se mettre en place. La seule question qui se poserait alors serait de savoir si elle s'arrêterait aux frontières de la France, ou si -plus probablement- elle ferait tomber l'un après l'autre, et rapidement, les 25 dominos européens. Dans le premier cas, l'UE, à peu près telle que nous la connaissons, survivrait à la crise, au prix d'une exclusion de fait de la France, pour une longue période. Dans le second, quelque chose subsisterait sans doute du long effort européen. Le minimum: le marché commun, une zone de paix et de coopérations sectorielles, par la concertation des élites politiques et économiques. Bref, la "post-UE" s'alignerait sur ce que sont généralement les nombreuses autres associations régionales d'Etats - par exemple l'ASEAN (Association des Nations de l'Asie du Sud-Est) ou le Mercosur sud-américain. Toute supranationalité substantielle et l'idée même d'un quelconque fédéralisme seraient reléguées aux oubliettes.
Le pire est-il donc sûr? Peut-on encore sauver la construction européenne, dans sa réalité et dans l'immense espoir qu'elle a suscité d'approfondissements à venir? Il est clair en tout cas que la voie choisie n'a pas été la bonne: depuis une décennie au moins, le divorce avec une partie croissante des opinions nationales est patent. D'où l'actuelle impression d'une véritable révolte contre l'Europe, certes accentuée en France par l'impopularité des équipes au pouvoir, mais sensible dans de nombreux pays. Le biais du rapprochement économique, axe principal depuis le traité de Rome -c'était là la conséquence de l'échec de la CED-, a été poussé si loin qu'il se trouve désormais victime de la loi des rendements décroissants, cependant que les progrès rapides de la mondialisation le vident d'une partie de sa substance. Le biais du rapprochement politique, dont la concrétisation la plus éclatante est justement le TCE, a surtout souligné les contradictions et accentué les divisions: faute d'un consensus minimum sur quelques principes, et sur les instances chargées de les mettre en oeuvre, ce remède menace maintenant de tuer le malade.
Une voie a jusqu'à présent été bien peu suivie: celle de la construction identitaire. Elle pourrait s'appuyer sur le plus positif de l'expérience historique de chacun des pays membres, soulignerait l'ancienneté et la profondeur de leurs interactions, et en dégagerait un petit nombre de valeurs communes, non pas négatrices des aventures nationales dans leur diversité, mais qui en représenteraient une manière de quintessence. Bref, rendre les Européens fiers d'être européens, désireux de partager et développer leurs héritages. N'y aurait-il pas là, potentiellement, le moyen de réunir, non pas 51% des opinions publiques, mais leur très grande majorité, condition d'un nouveau départ sur des bases solides?
On comprend que les pères de la construction européenne aient mis l'identité en sourdine. En son nom, les Européens venaient de se jeter à la gorge les uns des autres, lors des deux guerres mondiales. Il ne fallait pas risquer de réveiller les tentations nationalistes, militaristes et expansionnistes. Mais on conviendra que celles-ci ont depuis considérablement régressé, même si le populisme xénophobe pointe sa trogne ici ou là. Les Européens n'ont plus guère envie de repartir à la conquête du monde, ou de s'asservir les uns les autres. Loin de toute prétention à une quelconque supériorité, mais sans masochisme, il serait temps de réfléchir sur ce qui nous a rapproché et, osons le mot, sur ce que nous pouvons encore offrir au monde.
De ce point de vue, envisager l'intégration de la Turquie à l'UE était le pire des signaux: elle brouillerait définitivement toute possibilité de construction identitaire. On peut reprocher au TCE, en laissant cette porte ouverte, et plus généralement en ne traitant pas des limites de l'Europe, d'avoir contribué à son propre désaveu. Le meilleur service que l'UE puisse rendre à la Turquie, ne serait-ce pas de l'encourager par son exemple, et de l'aider pratiquement à construire une Union proche-orientale, hypothèse aujourd'hui certes lointaine, mais moins que celle d'une UE s'étendant sans limite, et demeurant cependant viable?
Quelles que soient les critiques à adresser à l'UE et au TCE tels qu'ils sont, on ne peut pour l'instant pas leur opposer d'alternative autre que le grand retour en arrière vers l'Etat-nation absolutiste. Il faut donc sauver les meubles, voter oui sans enthousiasme mais sans état d'âme, et repartir ensuite vers de plus beaux sommets.
Rédigé par : margolin | 24 mai 2005 à 23:41
@ egdtp :
ça fait longtemps, mais merci pour la réponse très riche et intéressante sur le sujet lancé par fraisouille : la déconnection des électeurs d'avec les élus. Je tenais à le rajouter.
Rédigé par : bougui | 24 mai 2005 à 23:45