Puisque plusieurs points ont été abordés trop rapidement, profitons de la souplesse de ce support pour les reprendre en détail.
Je me propose d'aborder ici le droit de pétition. Le thème n'est certainement pas un enjeu essentiel du referendum, mais il est nouveau, c'est déjà ça.
Alors, poudre aux yeux ? Gadget marketing ? Reprise d'un droit qui existe déjà ? Ou révolution démocratique en Europe ?
A mon avis, rien de tout cela.
Tout d'abord, le droit de pétition existe effectivement déjà. Il est posé à l'article 21 du Traité instituant la Communauté Européenne (TICE), actuellement en vigueur, et explicité à l'article 194 :
Tout citoyen de l'Union, ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre, a le droit de présenter, à titre individuel ou en association avec d'autres citoyens ou personnes, une pétition au Parlement européen sur un sujet relevant des domaines d'activité de la Communauté et qui le ou la concerne directement.
Cet article est d'ailleurs repris dans le TCE à l'article III-334. En effet, rappelons le, la partie III, tant décriée, ne fait pour l'essentiel que reprendre l'acquis communautaire, avec des modifications sur le fonctionnement des institutions.
Conformément à l'article I-10, paragraphe 2, point d) [qui reprend l'article 21 du TICE], tout citoyen de l'Union, ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre, a le droit de présenter, à titre individuel ou en association avec d'autres personnes, une pétition au Parlement européen sur un sujet relevant des domaines d'activité de l'Union et qui le concerne directement.
Rien de nouveau sous le soleil de Bruxelles, donc. Je ne crois pas qu'une pétition ait un jour effectivement abouti à une initiative législative, mais je ne puis l'affirmer catégoriquement.
Mais, car, n'en déplaise à notre animateur préféré, il y a toujours des mais, le TCE instaure en plus un nouveau droit de pétition, qui se veut plus efficace.
L'article I-47, 4° stipule en effet que :
Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application de la Constitution.
La grande nouveauté est que la pétition est adressée directement à l'organe qui a l'initiative des textes. Il y a des conditions : le million de signatures, le "nombre significatif" d'Etats membres, et des limitations : la pétition doit uniquement viser à proposer un acte juridique, qui doit être nécessaire aux fins de l'application de la Constitution. Là, les juristes haussent un sourcil intéressé : c'est du droit, tandis que le droit de pétition devant le parlement est, reconnaissons le, purement symbolique.
L'alinéa suivant de l'article I-47, 4° envoie à une loi européenne
(on parle aujourd'hui de règlement) le détail de la procédure : comment
garantir l'authenticité des signatures, nombre de pays différents pour
être significatif, modalités de la réaction de la Commission.
La loi européenne arrête les dispositions relatives aux procédures et conditions requises pour la présentation d'une telle initiative citoyenne, y compris le nombre minimum d'États membres dont les citoyens qui la présentent doivent provenir.
Je réfute d'emblée les contre-arguments les plus évidents qui vont être soulevés :
- sur le renvoi à une loi européenne dont on ne connaît rien pour le moment :
C'est un procédé normal, notre Constitution comprend énormément de
renvois à une loi organique pour fixer les modalités des principes
qu'elle pose, et pas des moindres. Un exemple ? D'accord :
Art. 6. - Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct.
Les modalités d'application du présent article sont fixées par une loi organique.
On reproche assez à ce traité d'être trop long et complexe pour se plaindre ensuite de l'absence du détail de cette procédure. De plus, une loi européenne est plus facilement modifiable.
- Qui dit que la Commission ne mettra pas directement à la poubelle ces pétitions ?
Rien. Je ne peux pas démontrer que tel ne sera pas le cas. Mais si ça l'était, et bien, on aurait un texte sans portée dans le TCE. Il rejoindrait le droit de pétition de l'article III-334, et ne ferait en tout état de cause de mal à personne. Cependant, je suis convaincu du contraire. Précisément parce que ces pétitions sont soumises à des conditions de recevabilité et encadrés par une loi européenne. Je l'ai déjà dit, on est en présence de règles, donc de droit : obligations, et sanctions. Cela annonce que la Commission aura l'obligation d'y donner suite, sous peine de violer la Constitution européenne, ce que sanctionnerait la CJUE. Y donner suite ne veut pas dire y faire droit : mais à tout le moins, la Commission devra répondre officiellement en expliquant son refus de prendre l'acte sollicité (refus éventuellement soumis à recours juridictionnel).
Le terme "inviter" est-il ou non comminatoire ? D'abord, pour
Versac, et les spectateurs d'Arrêt Sur Images : quand un policier vous
invite à le suivre, suivez le. Sinon, vous commettez un refus
d'obtempérer voire une rébellion, et vous risquez la prison. L'analogie
est un art délicat.
Dans le TCE, j'opine que ce terme "inviter"
est comminatoire. Il indique que la forme de la pétition doit être
respectueuse, mais c'est une invitation qui ne se refuse pas, sous la
réserve que j'ai dite précédemment : la Commission est tenue d'y réagir,
fût-ce par un refus, mais ne peut sans violer cet article ignorer
purement et simplement une telle pétition.
Gadget marketing, poudre aux yeux ? Non, c'est une vraie nouveauté, juridiquement encadrée et sanctionnée.
Révolution démocratique ? Non plus, une telle pétition, pour aboutir, devant respecter des contraintes qui seront lourdes : collecter un million de signatures authentifiables, rédiger une proposition "appropriée", ce ne sera pas à la portée du premier venu.
Seul l'avenir pourra dire, si ce texte entre un jour en vigueur, si ce nouveau droit de pétition sera un pivot de l'évolution du droit européen ou une simple curiosité juridique.
eyh fulcnalli, pourquoi vous n'entreriez pas en politique avec votrefameux système de double banque, ou écriviez un bouquin dessus, et arretiez de nous gonfler avec ça?? !! soyosn sérieux et réalistes : personne dans le NOn ne parle de ça, personne ne connait, et à vrai dire tout le monde s'en fiche.
quant à l'attitude de Libertador, elle ne me choque pas. c'ets celle des ultracommunistes trotskystes qui disent que les droits de l'homme sont un prétexte pour la bourgeoisie d'assurer son emprise, qu'ils n'ont aucune raison d'etre tant que les conditions dans la société ne sont pas réunies pour assurer l'égalité sociale. en gros, ils sont un leurre bourgeois. l'égalité proclamée ("tous les hommes naissent libres et égaux en droit") ne veut rien dire tant que l'égalité sociale n'est pas là.
c'est une position maximaliste qui convientà nier les droits fondamentaux.( et qui rejoint étrangement celle de Chirac ennTUnisie : "le premier des droits del'homme, c'ets de manger à sa faim") Personnellement, je suis attéré de lire de telles abberations : l'UE protège les droits fondamentaux, elle va meme beaucoup plus loin que bien des Etats membres sur ces questions. elle promeut les droits de lhomme au niveau international. les droits de l'homme sont universelles et supériures à tout régime politique. Je continuerai à les soutenir.
fulcanneli , revez d'une révolution si ça vous amuse. d'ailleurs, ça n'amuse que vous. et vous etes assez peu à y croire. Savez vous ce que les Sociétiques ontfait à ces fameux "gens du passé" ? déportés, massacrés, exterminés.
"Du passé , faisons table rase", n'est ce pas ?
hélas, en Europe, ce n'est pas comme ça que ça se passe : le NOn passe, Nice revient.
nos sociétés ont définitivement rejetés la violence en politique; tous les politologues et sociologues le disent.
e définitive, je suis donc désolé pour Libertador et Fulcanelli , mais le retour à l'etat soviétique (ou post-soviétique) n'ets pas pour demain. ni après demain.
Rédigé par : babr | 02 mai 2005 à 21:51
Eh bien si l'économie n'est pas compétitive ça peut poser quelques pbs. Plus de chômage, moins de rentrée fiscale pour l'état, moins de social.
Je propose à ceux qui hurlent contre l'économie compétitive d'aller vivre quelques années là où l'économie n'est pas compétitive, ça devrait éventuellement faire son effet.
Rédigé par : Eviv Bulgroz | 03 mai 2005 à 10:08
Le fait que les propositions de texte soient soumises au filtre de la commission présente un avantage que personne n'a évoqué (je dois avouer que j'ai lu les commentaires rapidement): il permet d'éviter l'examen ou l'adoption de mesures stupides et démagogiques sous la pression de groupes de pression populistes.
Ce n'est pas une vue de l'esprit: un parti comme le FN revendique plus de 50.000 adhérents: en s'alliant avec ses homologues de divers pays, en sollicitant son électorat, il serait donc facilement en mesure de soumettre des propositions par la voie de l'article I-47.
Dans cette catégorie, il faut se souvenir de la proposition de loi soumise au référendum par voie de pétition qui a été adoptée il y a quelques années en Californie (je crois), qui se proposait de supprimer quasiment tous les impôts directs. Les résultats ont été évidemment catastrophiques.
Il est donc sain et raisonnable que la Commission, gardienne de l'intérêt général Européen, puisse refuser une telle proposition. Et ce n'est pas du tout au mépris de la démocratie, bien au contraire: cela nous protège de la dictature des minorités.
Rédigé par : groM | 03 mai 2005 à 10:33
Whaou... Après avoir été "crypto-communiste" (merci Eviv...), me voici re-baptisé "ultracommuniste trotskyste"!!! Merci babr... Je ne crois pas trop me tromper en supposant qu'il s'agit là de L'Insulte (avec un grand I)... Je trouverais ça rigolo si c'était pas navrant...
Rédigé par : Libertador | 03 mai 2005 à 10:59
@ Babr:
En attendant, libre à toi de trouver fôôôrmidables les valeurs inscrites sur les frontispices, quand on ne se donne pas les moyens qu'elles aient une once de réalité... Superrrrrrrr !!!
Rédigé par : Libertador | 03 mai 2005 à 11:05
groM > Il est donc sain et raisonnable que la Commission, gardienne de l'intérêt général Européen, puisse refuser une telle proposition.
Allons bon, voila donc les députés européens ravalés aux rangs d'irresponsables. Il n'y a plus que la Commission qui est saine et responsable. C'est la meilleure de l'année, celle-là. D'autant plus que la commission est validée par le parlement européen !
Je rappelle à M. groM que ce sont les députés qui sont élus, pas la Commission.
le scénario suivant vous semble donc absurde :
1) l million de personnes proposent que la pêche à la ligne soit obligatoire
2) la commission prépare un texte dans ce sens
3) le parlement débat du texte, l'amende, l'accepte ou le repousse.
Ca vous semble absurde comme scénario ?
Et si la population décide de mettre en place une majorité de députés troskistes ou fachos. Et bien, que cela vous plaise ou non, il y aura des lois troskistes ou fascistes qui
1) seront proposées par la Commission toute saine et raisonnable qu'elle soit
2) votées par le Parlement
C'est aussi ça la démocratie.
Mais donc, voila : après que les oui-tistes montrent dans leurs discours qu'ils se méfient de la population et de ses réactions, voila maintenant qu'ils se méfient des députés, représentation populaire.
Vous avez raison les gars : y a que les technocrates et les apparatchiks qui font du bon boulot !
Dégouté.
Rédigé par : Abstruc | 03 mai 2005 à 12:07
A destination de Abstruc:
Tout d'abord, je te remercie pour ton agressivité gratuite et tes procès d'intention, cela fait toujours plaisir.
Ensuite, je ne sais pas pourquoi tu dis que je prends les députés européens pour des irresponsables: il n'y a pas une fois le mot député dans mon poste. Mais je te fais confiance, tu es tout autant capable de me reprocher cette absence.
Sur le fond, je répète précisément ce que j'ai dis, mais c'était à la fin du message, tu as dû t'étrangler d'indignation avant d'arriver jusque là: cette disposition nous protège de la dictature de la minorité, qui aurait ici le pouvoir de contraindre les institutions de l'Union à réaliser un travail inutile.
Dans le scénario que tu donnes sur le projet de pêche à la ligne, il ne me semble en effet pas nécessaire de gaspiller le temps de députés pour examiner des propositions stupides. La commission peut tout à fait réaliser un tel filtrage.
Si tu as peur que les méchants technocrates de la commission refusent une "invitation" par voie de pétition à laquelle le Parlement tient mordicus, celui-ci a tout loisir de censurer ladite commission pour faire prévaloir ses vues. Cela aurait un effet politique certain, je te prie de le croire.
Enfin, le procédé choisi a le mérite de la cohérence avec l'architecture institutionnelle de l'Union, qui réserve le droit d'initiative à la commission. Je sais d'avance ce que tu vas me dire: c'est pas démocratique, dans toutes les démocraties, le parlement a le droit d'initiative. C'est vrai. Mais statistiquement, c'est un pouvoir marginal qu'il n'exerce que fort peu, et bien souvent avec la bénédiction préalable du gouvernement. En France, il y a, si je me souviens bien, environ 130 lois votés par an, dont moins d'une dizaine sont d'initiative parlementaire, et aucune, sauf peut-être rarissime exception, originaire de la minorité parlementaire. Par contre le droit d'amendement est important; et le Parlement Européen en dispose pleinement dans la procédure législatve ordinaire.
Enfin dernier commentaire: si la majorité des Européens envoie une majorité fasciste au pouvoir à Bruxelles, alors il faudra espérer que la charte, appliquée par la cour de justice sous le contrôle des états, et préservée par la rigidité de la procédure de révision, pourra nous protéger des attaques contre les libertés fondamentales. Tout en sachant malheureusement que le droit s'incline toujours devant les faits.
Rédigé par : groM | 03 mai 2005 à 15:09
A destination de Libertador.
Si tu n'aimes pas les frontispices ronflants, je te suggère de demander le retrait du préambule de la constitution de la IVème République de notre bloc de constitutionnalité. Après tout, il proclame le droit à l'emploi et nous avons toujous 4 millions de chômeurs.
Scandaleux.
Ceci dit, dans ce tas de proclamations ronflantes, le conseil constitutionnel a réussi à trouver quelques breloques vaguement utiles, comme le concept des PFRLR (principes fondamentaux reconnus par les lois de la République): c'est comme ça que la liberté d'association a pris valeur constitutionnelle dans notre pays (décision 71-44 DC).
Alors oui, je préfère une déclaration ronflante sans rien pour s'assurer qu'elle soit appliquée, plutôt que rien du tout. Parce que ça va mieux en le disant.
Rédigé par : groM | 03 mai 2005 à 15:16
@ groM:
Puisque ça va mieux en le disant... Et rien qu'en le disant...
Rédigé par : Libertador | 03 mai 2005 à 16:27
"Encore une fois, désolé d'insister, les mots dans un tel texte possédent plus d'importance et de poids que votre espoir de les changer plus tard. Quant on signe un contrat il n'est plus question de dire ensuite "oui mais ce mot là il ne me plait pas je veux le changer" si la partie adversaire ne le veut pas. Le vote est un engagement ferme, la révision une éventualité."
Les traités européens sont révisés environ tous les 4-5 ans. Bien sûr ce n'est pas une loi mathématiques . Mais les anglais qui sont pas connus pour leur europhilie ont accepté de resigner d'autres traités tout en respectant leurs "lignes rouges" bien sûr.
Ya un argument que l'on entend de temps en temps, c'est de dire "c gravé dans le marbre" ou bien "on en a pour30-50 ans de libéralisme". Que l'on dise NON ou OUI on a la partie III pour 30-50 ans à moins de sortir de l'UE; De plus la fameuse partie III n'empêche pas la Suède d'avoir un modèle social très performant. Il n'en tient qu'à nos gvt de changer les choses.
"En attendant, libre à toi de trouver fôôôrmidables les valeurs inscrites sur les frontispices, quand on ne se donne pas les moyens qu'elles aient une once de réalité... Superrrrrrrr !!!"
C'es marrant car les valeurs qui n'engagent personne sont critiquées mais si elles étaient pas dans le traité on dirait "c'est pas normal que l'égalité homme-femmes soit pas reconnue......". Même si ça n'engage personne de les écrire c'est tout de même une reconnaissance de ces droits.
Pour le droit de pétition le fait de l'inscrire dans le TCE lui donne un effet plus fort que si c'était une pétition normale. Ca parait logique. Ce droit est critiquable (on aurait pu dire "oblige la Commission à examiner la proposition") mais c'est quand même un truc nouveau. On peut pareil regretter que le PE n'ait pas l'initiative des lois mais ce TCE accroit tout de même ses pouvoirs.
En fait on a un peu tendance que l'UE se fait à petit pas.
Publius(merci pour votre travail car ce genred de sites contribue beaucoup à mon travail d'info sur le TCE) pourrait faire un billet sur la remise en cause ou non des services publics?
Rédigé par : esperanza | 03 mai 2005 à 22:18