Continuons notre petite série exploratoire du titre III de la partie III de la constitution. Après le chapitre 1 consacré au marché intérieur et le chapitre 2 consacré à la politique économique et monétaire, le chapitre 3 se penche sur les "politiques dans d'autres domaines". Il s'étend des articles III-203 à III-256.
Ce chapitre couvre en fait dix domaines, détaillés en autant de "sections", qui correspondent à une bonne partie des compétences partagées entre l'Union et les Etats-membres : emploi, politique sociale, cohésion territoriale, agriculture et pêche, environnement, protection des consommateurs, transports, réseaux transeuropéens, recherche, et enfin énergie. Voyons ce qui change avec le traité constitutionnel par rapport aux traités actuellement en vigueur.
Section 1 : Emploi
Articles 203 à 208 : aucune modification par rapport aux traités actuels.
Section 2 : Politique sociale
Articles 209 à 211 : pas de modification. L'article 212 qui porte sur les accords entre partenaires sociaux au niveau européen précise que, désormais, le Parlement européen est informé des accords ainsi passés. Pour le reste, la procédure reste la même : les partenaires sociaux se mettent d'accord, la Commission propose un texte à partir de cet accord, le Conseil adopte le texte (règlement ou décision : attention, j'emploie les nouvelles dénominations). L'article 213 qui porte sur la coopération entre Etats membres en matière de politique sociale précise, comme l'article 212, que là aussi le Parlement est désormais informé des mesures prises dans ce domaine (échange des meilleurs pratiques, établissement d'indicateurs...). Les articles 214 à 219 reprennent l'existant.
Section 3 : Cohésion économique, sociale et territoriale
L'article 220 connaît plusieurs modifications. Jusqu'à présent seules les régions rurales étaient citées comme devant faire l'objet de cette politique de cohésion. Le traité constitutionnel y ajoute les "zones où s'opère une transition industrielle" et les "régions qui souffrent de handicaps naturels ou démographiques graves et permanents telles que les régions les plus septentrionales à très faible densité de population et les régions insulaires, transfrontalières et de montagne".
Les articles 221 et 222 sont inchangés. A l'article 223, la procédure de décision sur les fonds structurels est modifiée : aujourd'hui le Conseil statue à l'unanimité, le traité constitutionnel prévoit le passage à la majorité qualifiée. Toutefois, le paragraphe 2 prévoit que les premières dispositions sur le sujet sont adoptées à l'unanimité (sans précision sur la portée temporelle de ces "premières dispositions"). L'article 224 ne connaît pas de modification.
Section 4 : Agriculture et pêche
Pas de changement pour les articles 225 à 229. L'article 230 étend la procédure de codécision aux conditions d'application des régles de la concurrence à la PAC. Actuellement le Parlement n'a qu'un rôle consultatif en la matière. L'article 231 prévoit une évolution similaire à l'article 230 avec l'extension du champ de la codécision à l'établissement de l'organisation commune des marchés agricoles ainsi qu'aux autres dispositions nécessaires à la poursuite des objectifs de la PAC. L'article 232, quant à lui, n'est pas modifié.
Section 5 : Environnement
Pas de moficiation à l'article 233. L'article 234 prévoit une clause passerelle qui permettra de passer de l'unanimité à la procédure de codécision pour les sujets évoqués dans l'article (fiscalité "verte", gestion des ressources hydriques, affectation des sols, approvisionnement énergétique).
Section 6 : Protection des consommateurs
Pas de modification à l'article 235, le seul sur le sujet.
Section 7 : Transports
A l'article 236, on passe de l'unanimité à la procédure de codécision pour tous les sujets concernés par l'article (suppression des dérogations actuellement en vigueur). Les articles 237 à 242 sont inchangés. L'article 243 sur les dérogations dont bénéficie l'Allemagne pour aider à sa réunification connaît une légère modification : il est prévu que ces dérogations pourront être supprimées par décision du Conseil cinq ans après l'adoption de la constitution. On retrouve ainsi une procédure similaire à celle évoquée à l'article 167 (voir ce précédent billet). Les articles 244 et 245 ne sont pas modifiés.
Section 8 : Réseaux transeuropéens
Pas de changement à l'article 246. Le 247 prévoit désormais une consultation du Comité des régions et du Comité économique et social, et précise que les projets d'intérêt communautaire qui concernent le territoire d'un Etat membre recquièrent l'accord de celui-ci.
Section 9 : Recherche et développement technologique et espace
L'article 248 prévoit la mise en place d'un "espace européen de la recherche", concrétisant ainsi un des objectifs de la stratégie de Lisbonne. Cet article prévoit également, comme autre nouveauté, la promotion de la coopération entre chercheurs par delà les frontières.
L'article 249 reprend l'existant. L'article 250 précise que les mesures de coordination évoquées peuvent consister à établir des orientations et des indicateurs, à organiser l'échange de bonnes pratiques ainsi qu'à préparer les éléments nécessaires à la surveillance et à l'évaluation périodiques. De plus, le Parlement européen est désormais informé des mesures prises en la matière. L'article 251 prévoit (paragraphe 4) que la procédure de codécision s'applique pour la mise en oeuvre de l'espace européen de recherche. Les autres paragraphes de l'article reprennent ce qui existe déjà.
Les articles 252 et 253 ne sont pas modifiés. L'article 254 est lui nouveau. Il est consacré à la politique spatiale, qui devient ainsi une compétence partagée entre l'Union et les Etats membres. La procédure de codécision est de rigueur ici aussi. Enfin, l'article 255 ne connaît pas de changement.
Section 10 : Energie
L'article 256 (le seule de cette section) est nouveau. Il prévoit une base juridique pour des mesures communautaires dans le cadre de la politique énergétique. La procédure de codécision s'applique, sauf pour les mesures d'ordre fiscal, qui restent à l'unanimité. L'article précise également que la législation européenne ne peut pas affecter le choix d'approvisionnement entre différence sources d'énergie fait par un Etat membre.
Bilan : Sur le fond des politiques menées, ce chapitre apporte assez peu de nouveauté. Un effort sur la politique de recherche et de l'espace est quand même perceptible. Mais sur un tel sujet l'essentiel se joue dans les négociations budgétaires entre Etats membres et non dans la constitution en elle-même.
Par ailleurs, comme dans d'autres domaines, on voit à l'oeuvre l'extension du champ de la codécision dans ce chapitre.
La prochaine note, sur le chapitre 4 (espace de liberté, de sécurité et de justice), devrait être plus amusante (pour vous, comme pour moi !), puisqu'il s'agit d'un des domaines qui connaît le plus de changements dans la partie III.
ah ah, enfin on va bien s'amuser autrement qu'en prenant le non comme tête de Turc !
(je suis bien en forme aujourd'hui !)
Rédigé par : Paxatagore | 11 avril 2005 à 16:28