Pendant qu'Emmanuel suit les débats à l'assemblée nationale, voici un intermède en forme de débat sur les arguments du non de droite.
Les différents partis commencent en effet à fourbir leurs armes pour la campagne, qui devrait battre son plein avant l'été, ainsi que l'a décidé notre président. La plupart sont donc en train de construire leurs arguments, en majorité pour le oui.
Du coté du non, on ne sait pas encore ce que feront les non du PS. On imagine bien ce que seront les campagnes de LO, LCR et du parti communiste, sur fond de lutte contre l'Europe libérale, les délocalisations, le manque "d'Europe sociale". Mais il est un non dont on a peu parlé jusqu'ici, celui des souverainistes de droite.
Les partisans du non de l'UMP et du MPF se sont réunis autour du ""Collectif pour une confédération des États d’Europe", et ont lancé la bataille. Un site de campagne, non-2005.org, a été mis en place. Il s'est rallié à une campagne paneuropéenne contre le traité, la european no campaign, initiative transpartisane, qui rassemble des personnalités diverses, mais partageant l'idée d'une Europe non fédérale, intergouvernementale, et principalement économique.
En France, donc, c'est l'occasion de voir l'argumentaire des souverainistes se développer. On peut voir sur le site leurs sept arguments contre le traité :
1 – La Convention a violé le mandat confié par le Conseil européen de Laeken
2- La constitution européenne est bien plus qu'un simple Traité
3 – Elle est de fait impossible à réviser
4 – Elle vide les démocraties européennes de leur souveraineté
5 – Elle grave dans le marbre des options économiques monétariste et mercantile, échappant définitivement aux choix politiques
6 – Elle sonne le glas du modèle républicain de citoyenneté
7 – Elle brise le rêve d'une Europe européenne
Je ne passerai pas ces arguments en détail. Chacun me semble pouvoir être réfuté, à tout le moins discuté. Le premier est une vision assez fausse de l'esprit dans lequel s'est constitué et a travaillé la convention. Le second est juste : il s'agit bien d'un traité instituant une constitution, et c'est d'ailleurs pour ça que c'est important. Le troisième est faux. Le quatrième également, puisque la constitution a justeemnt pour objet de préciser le principe de subsidiarité, c'est à dire la répartition des compétences entre Etat et Union. Le cinquième rejoint la critique de gauche, qui est sans doute la partie la plus discutée du texte. Enfin, il me parait choquant d'annoncer la fin du modèle républicain de citoyenneté, pas moins que ça, sur la simple base de la charte des droits fondamentaux, qui ne sont que complémentaires (Paxatagore, reprenez-moi, ou précisez-moi) de notre propre déclaration des droits de l'homme. On voit en tout cas bien sur quels points se fera la campagne du non. Pas de tréteaux communs, disaient-ils.
Ce qui m'inquiète plus, ce sont les visuels développés par ce collectif (ci-dessous, cliquez pour agrandir, également disponibles ici). Leur fonctionnement est clairement populiste, en celà qu'il appelle des peurs, en jouant sur un registre très émotionnel, peurs qui n'ont que peu à voir avec le sujet, et posent des affirmations fausses sur le contenu du traité. Celà me semble indigne d'une campagne juste sur le sujet.
Pour le premier, lier la peur des délocalisations au traité est assez honteux. Le traité ne fait d'ailleurs que reprendre le principe du marché commun, puis unique, sous lequel nous vivons depuis déjà des années. Son principe est celui d'une union douanière, pas du tout d'une suppression de toutes les protections (on ouvre à l'intérieur de l'union). C'est un grossier mensonge que de faire croire que l'adoption du traité fera partir plus d'meplois en Chine. J'aurais plutôt tendance à penser le contraire. J'espère que nul ne sera dupe de cette manipulation.
Le deuxième visuel est d'un niveau aussi accablant. On nous annonce que le parlement, notre parlement, ne pourra plus faire la Loi (quand on sait que c'est à peu près tout ce qu'il fait, il y aurait en effet de quoi être inquiet). les ministres, par ailleurs, deviendraient les éxécutants des décisions de Bruxelles et Luxembourg. Notez l'utilisation de deux villes étrangères. On se croirait dans un remake du parti de l'anti-France. Il est évident que ces deux affirmations sont des affabulations totales, fondées là encore sur des discussions de certains de nos piliers de café du commerce les plus actifs. Le texte consacre au contraire une Europe de coopération entre gouvernements, limite à des domaines stricts les pouvoirs de la commission, et améliore le contrôle parlementaire, tant au niveau européen (on eût pu souhaiter plus) qu'au niveau national (le parlement aura un rôle plus important à jouer dans ces affaires, c'est notamment le sujet des discussions de ce soir, qu'Emmanuel nous relate).
Messieurs les partisans du non. Il est encore temps de revoir vos arguments, pour mener au minimum une campagne élégante.
Merci pour ton article Versac.
Je suis accablé quant je vois ces deux affiches mensongéres.
Rédigé par : socdem | 27 janvier 2005 à 16:52
Les deux autres affiches de la page citée sont également d'une rare élégance (le drapeau turc et "obéir à M. Bush"). Si l'argumentation xénophobe est déjà dégainée, cela promet une campagne de haute tenue.
Rédigé par : alexandre delaigue | 27 janvier 2005 à 18:12
"Leur fonctionnement est clairement populiste, en celà qu'il appelle des peurs, en jouant sur un registre très émotionnel, peurs qui n'ont que peu à voir avec le sujet, et posent des affirmations fausses" : tu avais pensé la même chose de la campagne du PS aux élections de mai dernier ? (spots de pub où ,entre autres, l'on demandait à un malade arrivé aux urgences s'il payait par carte bleue ou en liquide, avec "voulez-vous d'un monde de droite?" ou un truc comme ça).
Rédigé par : Richard | 27 janvier 2005 à 20:40
Je n'avais pas vu/entendu ladite campagen. Mais, si effectivement on disait ce genre de choses, ça m'évoquerait volontiers le même type de sentiments.
Rédigé par : versac | 27 janvier 2005 à 23:03
"Notez l'utilisation de deux villes étrangères"
Trois, non? A moins que la France n'ait annexé Luxembourg récemment. Notons l'absence notable de Strasbourg, qui est pourtant devant Francfort dans l'ordre de préséance européen.
Pour l'argumentaire des souverainistes de l'UMP, les derniers des Mohicans Myard et Dupont-Aignan, je renvoie à leurs discours à l'Assemblée (3 séance du mardi 25 janvier et 2e séance du mercredi 26 janvier).
http://www.assemblee-nationale.fr/12/cra/2004-2005/124.asp
http://www.assemblee-nationale.fr/12/cra/2004-2005/126.asp
Rédigé par : Emmanuel | 27 janvier 2005 à 23:27
@Versac : la charte des droits fondamentaux est effectivement subsidiaire : elle ne doit pas être interprétée (elle le dit elle-même) comme donnant moins de droits aux citoyens, elle ne s'applique qu'aux actes pris par l'Union Européenne ou par les Etats dans la mise en oeuvre directe d'une politique européenne. Je prépare un petit topo là dessus, comme un autre sur le cadre constitutionnel de la politique étrangère de l'Union.
Rédigé par : Paxatagore | 28 janvier 2005 à 09:47
Comparer la campagne anti-turc de certains partisans du non et la campagne du PS qui s'inquiétait de la dégradation des conditions sociales est un raccourci pour le moins audacieux et injuste.
Rédigé par : socdem | 28 janvier 2005 à 10:44
socdem : il s'agit de la méthode. Je trouve honteux de faire appel à la peur chez l'électeur. Que ce soit la peur du grand capital ou la peur de l'étranger. On est malgré tout dans les mêmes mécanismes. Surtout quand on est dans de l'imaginaire le plus total, qui caricature en dépssant l'extrème l'opinion adverse ou le risque à faire appel à la solution qu'on ne défend pas.
Paxa : thanks.
Emmanuel : of course, j'avais du prendre Luxembourg pour une province bancaire européenne. Mes excuses au grand duché. On ne parle pas de Strasbourg, puisque tout le monde sait que cette ville n'est pas vraiment française, puisque le "parti de l'étranger" y est à l'oeuvre.
Rédigé par : versac | 28 janvier 2005 à 10:58
socdem il faut etre honnete, meme si le PS était en
tete aux élections Européennes, l'abstention était
record.Il faut toujours se poser des questions meme
quand on est les 1ers. Je donne raison à Richard.
Rédigé par : Brigitte | 28 janvier 2005 à 16:35
Ai je parlé de l'abstention Brigitte????
Quant aux campagnes, Versac, elles sont souvent émotionnelle.
Celle là n'était pas populiste, essaie de trouver le clip.
ça denonçait les suppression de transports en commun (Réelles dans beaucoup de villes), la dégradation de la situation des chomeurs (Le clip mentionne une mesure réellement existante passée par la droite...) et le recul de l'âge à laquelle on peut prendre sa retraite...
Rédigé par : socdem | 28 janvier 2005 à 17:12
Belle note. Ce qu'il y a d'agaçant dans le comportement de ces partisans du "non", ce n'est en effet pas tant le fait qu'ils s'opposent au texte, mais qu'ils le fassent par le mensonge pour semer le trouble chez les électeurs. Qui croire quand les uns disent "blanc" et les autres "noir" ? Je pense pour ma part que c'est entièrement voulu, c'est pourquoi il convient, comme vous le faites bien ici, de démasquer encore et encore les impostures.
Très bon blog en tout cas. Je reviendrai... :o)
Rédigé par : Damien | 28 janvier 2005 à 18:52
knowing something of everything and everything of something.
Rédigé par : coach shoes | 15 novembre 2010 à 09:24
Messieurs les partisans du non. Il est encore temps de revoir vos arguments, pour mener au minimum une campagne élégante.
Rédigé par : oakley frogskins | 03 août 2011 à 09:59
socdem il faut etre honnete, meme si le PS était en
tete aux élections Européennes, l'abstention était
record.Il faut toujours se poser des questions meme
quand on est les 1ers. Je donne raison à Richard.
Rédigé par : burberry scarf | 30 novembre 2011 à 09:33