Communiqué du "Oui Socialiste" Depuis deux mois, on nous explique que le traité est une " constitution " qui " fige le libéralisme dans le marbre ", mais ne rend pas opposable les droits contenus dans la charte des droits fondamentaux, même si ses dispositions menacent quand même la laïcité... Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision sur le traité constitutionnel européen. Les 9 " sages " mettent ainsi fin définitivement à ces arguments polémiques. Les extraits reproduits ci-dessous sont ceux de la décision n°2004-505 DC du 19 novembre 2004. ------------------------- 1/ Le traité constitutionnel est... " un traité ". Il ne grave donc rien dans le marbre. ------------------------- " Il résulte des stipulations du traité, et notamment de celles relatives à son entrée en vigueur, à sa révision et à la possibilité de le dénoncer, qu’il conserve le caractère d’un traité international " " ... /... n’appelle pas de remarque de constitutionnalité la dénomination de ce nouveau traité ; qu’en effet, il résulte notamment de son article I-5, relatif aux relations entre l’Union et les Etats membres, que cette dénomination est sans incidence sur l’existence de la Constitution française et sa place au sommet de l’ordre juridique interne ". ------------------------- 2/ La laïcité n’est pas menacée ------------------------- " si le premier paragraphe de l’article II-70 reconnaît le droit à chacun, individuellement ou collectivement, de manifester, par ses pratiques, sa conviction religieuse en public, les explications du præsidium précisent que le droit garanti par cet article a le même sens et la même portée que celui garanti par l’article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’il se trouve sujet aux mêmes restrictions, tenant notamment à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé et de la morale publics, ainsi qu’à la protection des droits et libertés d’autrui ; que l’article 9 de la Convention a été constamment appliqué par la Cour européenne des droits de l’homme, et en dernier lieu par sa décision susvisée, en harmonie avec la tradition constitutionnelle de chaque Etat membre ; que la Cour a ainsi pris acte de la valeur du principe de laïcité reconnu par plusieurs traditions constitutionnelles nationales et qu’elle laisse aux Etats une large marge d’appréciation pour définir les mesures les plus appropriées, compte tenu de leurs traditions nationales, afin de concilier la liberté de culte avec le principe de laïcité ;que, dans ces conditions, sont respectées les dispositions de l’article 1er de la Constitution aux termes desquelles " la France est une République laïque ", qui interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s’affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers. " ------------------------- 3/ La charte des droits fondamentaux sera évidemment invocable devant le juge ------------------------- Le Conseil constitutionnel s’est appliqué dans sa décision à préciser les conditions d’application de la charte. Il a notamment rappelé que " en vertu du paragraphe 5 de l’article II-112, la charte comporte " : ------------------------- 4/ Les avancées sur le plan démocratique supposent de modifier notre constitution ------------------------- les aspects identifiés comme nécessitant une révision constitutionnelle en France correspondent à des avancées majeures de la Constitution : ------------------------- 5/ Le traité constitutionnel sera plus facile à réviser que les traités antérieurs ------------------------- Le Conseil constitutionnel consacre de longs développements aux modes de révision simplifiée du traité constitutionnel, preuve qu’ils existent... Ils appellent une révision de notre Constitution puisque pourrait être décidé le passage de la règle de l’unanimité à celle de la majorité qualifiée dans des domaines, pour le moment régi à l’unanimité, sans passer par l’adoption d’un nouveau traité. Comment mieux dire que ce traité assouplit avec les " clauses passerelles " les modes de révision de ce traité.
Très d'accord sur 2. : il y a suffisamment de critiques légitimes à faire sur ce traité pour ne pas employer des arguments démagogiques et fallacieux contre lui.
D'accord sur 3., 4. et 5. même si un opposant du non cohérent répondrait que l'enjeu n'est pas de savoir si le traité apporte des avancées par rapport aux traités antérieurs (je crois que toute personne de bonne foi le reconnaît - je laisse de côté le point de vue souverainiste pour qui, logiquement, le texte est un recul) mais de savoir si ces avancées sont suffisantes, et si le refus du texte dans sa forme actuelle ne permettrait pas d'obtenir des avancées plus importantes.
Assez sceptique sur 1. : il ne faut pas oublier, comme le soulignait Paxatagore, que la place respective des traités européens et des constitutions nationales dans la hiérarchie des normes fait l'objet d'un vif débat. Le CC français défend la primauté de la constitution, la cour de Luxembourg a semblé la contester dans certaines de ses décisions.
C'est au regard de la jurisprudence du CC qu'il faut apprécier la qualification de "traité" : en fait, le texte présente à la fois des caractères propres à un traité traités et certains traits qui le rapprochent d'une constitution. C'est un problème général avec le cadre institutionnel européen, qui s'apprécie difficilement avec les critères du droit interne ou du droit international classique.
Enfin, je ne comprends pas bien l'argument selon lequel "rien n'est gravé dans le marbre" puisque le texte est un traité. Aucun texte juridique ne grave jamais rien dans le marbre. Les modalités de révision sont plus ou moins exigeantes, mais aucune diposition juridique n'est a priori éternelle. Que l'on considère le texte comme un traité ou une constitution ne change rien à l'affaire.
Rédigé par : Emmanuel | 22 novembre 2004 à 17:30
Ce dit Emmanuel est très vrai. En tant que juriste, je m'insurge contre la marmorisation de notre métier. Le droit, c'est vivant et en perpétuel mouvement (et c'est bien là le problème !).
Rédigé par : Paxatagore | 22 novembre 2004 à 18:35
J'ai lu l'avis du conseil constitutionnel in extenso contrairement a celui ci qui n'en contient que des extraits.
Il est tres clair que cet arrêt démoli l'argument de charasse sur la laicité. Argument auquel je n'ai jamais cru.
Mais l'arrêt dit aussi contrairement à ce que dit le point 3 que la charte n'ouvre en realité aucun droit qui saurait être invoqué en contradiction avec tout texte ou droit national ! En somme elle n'est en rien contraignante ! Ce qui est logique avec le point 2.
La charte ne peut etre invoquée que contre des textes de portée générale commune à tout les pays.
Pour le reste ce que je consteste dans cette constitution c'est cette habitude europénne de lier de facon systematique la politique et les institutions organisant ainsi le fameux dilemme de la paralysie ou de l'impuissance democratique sur les politiques. Or ce traité reste dans cette même philosophie que de plus en plus de personnes rejettent.
Concernant le gravé dans le marbre au moins si il reste nice on pourra le denoncer sans remettre en cause maastricht, tandis que remettre en cause ce traité (qui remplace tout les autres traités existants) c'est obliger a remettre à plat tout le chantier. Donc dans ce sens sa revision est plus difficile que les traités précédents. De plus il est indiqué dans ce traité que tout traité ulterieur ne peut être en desaccord avec cette constitution. Pas d'ajout possible, seul une renegociation globale est permise pour tout changement concernant les competences de l'union (la clause de revision simplifiée sur la partie III est tres restrictive).
Encore autre chose savez vous que nice prevoit une cooperation renforcée à 7 et non comme ce traité à 9. Et le traité de nice restera à 7 quelque soit le nombre de membres de l'UE contrairement à ce traité ou de 9 il faudra etre 10/11 lorsque l'on sera 30 dans 5 ans.
Un recul ? Non impossible car forcement des qu'il y a accord c'est une avancée.
Rédigé par : prevalli | 23 novembre 2004 à 23:24
Je cite in extenso pour lire mieux votre point 3: Considérant qu'il y a lieu d'apprécier la conformité à la Constitution de la « Charte des droits fondamentaux de l'Union » qui constitue la deuxième partie du traité soumis au Conseil constitutionnel ;
15. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article II-111 du traité et à l'exception de ses articles II-101 à II-104, lesquels ne concernent que les « institutions, organes et organismes de l'Union », la Charte s'adresse aux Etats membres « lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union » et « uniquement » dans ce cas ; qu'elle est sans incidence sur les compétences de l'Union ; qu'en vertu du paragraphe 5 de l'article II-112, elle comporte, à côté de « droits » directement invocables devant les juridictions, des « principes » qui constituent des objectifs ne pouvant être invoqués qu'à l'encontre des actes de portée générale relatifs à leur mise en oeuvre ; qu'au nombre de tels « principes » figurent notamment le « droit d'accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux », le « droit de travailler », le « droit des personnes âgées à mener une vie digne et indépendante et à participer à la vie sociale et culturelle », le « principe du développement durable » et le « niveau élevé de protection des consommateurs » ;
16. Considérant, en deuxième lieu, que, conformément au paragraphe 4 de l'article II-112 du traité, dans la mesure où la Charte reconnaît des droits fondamentaux tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres, « ces droits doivent être interprétés en harmonie avec lesdites traditions » ; que sont dès lors respectés les articles 1er à 3 de la Constitution qui s'opposent à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d'origine, de culture, de langue ou de croyance ;
17. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de son préambule, « la Charte sera interprétée par les juridictions de l'Union et des Etats membres en prenant dûment en considération les explications établies sous l'autorité du præsidium de la Convention qui a élaboré la Charte » ; que le paragraphe 7 de l'article II-112 du traité dispose également que : « Les explications élaborées en vue de guider l'interprétation de la Charte des droits fondamentaux sont dûment prises en considération par les juridictions de l'Union et des Etats membres » ;
bref le CC confirme le caractére tres restrictif de la charte et invoque des principes tels que l'accés à la securité sociale.
Ce qui veut dire que ce texte ne peut être invoqué que si demain au niveau de l'europe on interdit à tel ou tel personne citoyen d'un pays membre l'accés à la sécurité sociale et ne prejuge en rien ni de son caractére (privé public) qui lui peut être considéré en opposition avec le principe de libre concurrence (ouverture du monopole de la secu). Ce que cette charte garanti c'est l'existence d'une securité sociale meme à 1 euro par jour ! Seul l'ACCES est garanti ! Bref t'a le droit sur le "principe" invocable uniquement contre les "textes de portée générale" (donc pas de portée limitée) d'avoir accés à une sécu Chouette !
On a aussi le droit DE travailler chouette au cas ou j'aurais pas voulu.
Et enfin vieux j'ai de la chance car si jamais un texte un jour interdisait à tous les vieux de vivre dignement et de façon independante je pourrais avoir un recours, mais en revanche si un texte de portée non générale mais limitée (comme la suppression des pensions de reversions l'augmentation de l'age de la retraite etc..) venait à passer l'invocation de cette charte ne pourrait se faire. D'autant qu'elle ne s'applique que « lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union » et « uniquement dans ce cas» donc rien si cela ne vient pas de l'application d'une directive. Or le social et le fiscal n'est pas dans le domaine de l'union aucun risque sur ce plan.
Portée de la charte en terme de progrés zero. Elle aurait un sens seulement si le social faisait partie des competences de l'union. Ce qui n'est pas le cas.
je vais prendre un exemple pour illustrer mon propos. La constitution fixe en dur 3% de deficit budgétaire, le gouvernement decide pour reduire ce deficit et notamment celui lié aux retraites de diminuer les retraites par deux. cela passe pourquoi ?
parceque la competence de l'union c'est le 3% pas la decision du gouvernement de diviser les retaites par deux, donc cela ne peut etre contesté via la charte. Cela l'aurait pu si jamais c'etait une directive qui le demandait specifiquement. clair ?
Donc la charte n'empeche effectivement pas de mener une politique de gauche en france (quoi que on pourrait discuter la partie III qui elle la limite serieusement) mais en revanche elle n'apporte rien en terme de competence ou d'harmonisation sociale ! et n'apporte aucun droits nouveaux !
Et le probléme n'est pas de savoir si on pourra faire une politique PS en france mais de savoir si on va essayer de se donner des outils d'harmonisation sociale en europe vers le haut.
Rédigé par : prevalli | 23 novembre 2004 à 23:48
je compare enfin ce texte du oui avec la realité du texte
Le Conseil constitutionnel s’est appliqué dans sa décision à préciser les conditions d’application de la charte. Il a notamment rappelé que " en vertu du paragraphe 5 de l’article II-112, la charte comporte " :
° " des droits directement invocables devant les juridictions ",
° des " principes " qui peuvent être invoqués " à l’encontre des actes de portée générale relatifs à leur mise en oeuvre ".
et
qu'en vertu du paragraphe 5 de l'article II-112, elle comporte, à côté de « droits » directement invocables devant les juridictions, des « principes » qui constituent des objectifs ne pouvant être invoqués qu'à l'encontre des actes de portée générale relatifs à leur mise en oeuvre
vous remarquerez la nuance du " à l'encontre" et du "qu'a l'encontre"
cela s'appelle de la desinformation ou de la manipulation du sens. ooooooh
Rédigé par : prevalli | 23 novembre 2004 à 23:53
Prevalli : pouvez-vous m'indiquer où la Constitution "fixe en dur" le critère de 3% de déficit public?
Rédigé par : Emmanuel | 25 novembre 2004 à 01:09
emmanuel la constitution est composée de trois partie
le corps principal dant tout le monde discute
les declarations annexes et les protocoles
les interpretations du praesidium
les trois sont considérés comme faisant partie de la constitution. C'est pourquoi on parle d'u n pavé de plus de 400 pages !
Lisez l'ensemble. Tout les traités antérieurs ont été intégrés dans la constitution y inclus le pacte de stabilité. Celui ci est repris dans le texte suivant CIG 87/04 ADD 2.
Desormais ce texte comme les autres est soumis aux clauses de revision de la constitution.
Rédigé par : prevalli | 25 novembre 2004 à 10:16
le lien que l'on trouve sur ce site
http://europa.eu.int/constitution/download/protocols_annexes_FR.pdf
page 262 ce sera vite trouvé.
Rédigé par : prevalli | 25 novembre 2004 à 10:24
Merci pour la précision. Je cherchais vainement le protocole dans une version antérieure du texte. Voir ma note plus haut pour une discussion sur les textes annexés.
Rédigé par : Emmanuel | 25 novembre 2004 à 19:35